Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

venait d’arriver à Chandernagor lorsque les Hollandais élevèrent les premiers cette prétention. Dans la crainte d’aggraver des dispositions qu’il connaissait mal, il commença par consentir à leurs exigences. Ainsi que l’écrivit plus tard la Compagnie, il n’aurait jamais dû s’assujettir à cette formalité déshonorante, propre pour avilir les Français dans l’esprit des Indiens ; mais, quand il connut mieux la situation, il se ravisa et prit, sous sa propre responsabilité, une attitude plus énergique. Dans le courant de décembre, les Hollandais s’étant permis au moment de l’arrivée du Saint-Pierre de demander sa commission au capitaine Butler, Dupleix fit monter à bord pour le voyage de retour 50 soldats français et 2 officiers avec ordre de résister à leurs exigences par la force. Il n’était pas sûr, en donnant ces ordres, d’être approuvé en France, où la formule « pas d’histoire » était déjà pratiquée, aussi provoqua-t-il des instructions plus précises de la Compagnie.

« Ces ordres, écrivit-il en janvier, sont d’autant plus nécessaires qu’étant fort éloignés de France, on est au moins dix-huit mois pour avoir réponse, et pendant ce temps que l’on est forcé de se tenir tranquille, les gens du pays croient que c’est par crainte que nous n’osons nous revancher. Ils en sont persuadés par les discours que leur tiennent les Anglais et les Hollandais ; le mépris et le discrédit en sont la suite ; c’est ce que demandent ces deux nations. Ils ont fait les surpris de voir dans le Gange quatre vaisseaux d’Europe ; ils semaient dans le public que notre Compagnie n’était pas en état de faire un tel envoi[1]. »

Les Hollandais laissèrent passer le Saint-Pierre sans l’inquiéter. Mais alors ce fut le tour des Anglais de nous tracasser ; ils prétendaient qu’à Balassor nous fournissions

  1. A. P. t. 102, p. 168 et 245.