Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/277

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Bénarès, Allahabad, Agra et Delhi, qui s’échelonnent le long du Gange et de la Gemna et étalent aux yeux des visiteurs une variété fort curieuse de monuments et de palais, dont quelques-uns sont d’une rare beauté. Au début du xviiie siècle on n’avait aucun goût pour l’exotisme, et s’il arriva parfois à Dupleix de s’intéresser aux étrangetés du pays, c’était plutôt aux bibelots et dans un but commercial[1].

Gagner de l’argent, tel fut en effet son but principal, au moins pendant cette première partie de son existence. C’est seulement au xixe siècle, par une autre conception de la politique coloniale, que les divers fonctionnaires de l’État ont été tenus à ne pas s’intéresser dans les affaires dont ils avaient la police générale ; au xviiie siècle ils étaient au contraire moralement obligés de s’associer dans les diverses entreprises qu’ils voyaient s’organiser ; aussi ne sera-t-on pas surpris que Dupleix, comme

  1. Sa correspondance est pleine de renseignements sur son amour plus ou moins spéculatif pour les bibelots ou curiosités. Le 24 décembre 1735, il demanda à Martin, chef de l’établissement de Surate, de belles agathes soit pour dessus de tabatières, soit pour boutons ou poignées de cannes. Le 15 décembre 1736, il pria Lanoë au Pégou de lui procurer un beau rubis et l’autorisa à aller jusqu’à 700 pagodes. Le même jour, il commanda en Chine, à Brignon, deux beaux services de thé, trois pièces de satin uni cramoisi, bleu et jonquille, une douzaine de beaux éventails, sans compter des ouvrages en ivoire, or ou argent. Il écrivit à Groiselle de lui envoyer de Patna, un sabre, un arc, un carquois garni de flèches, un service à dessert de verres dorés, et de lui dire tout ce qu’il verra de curieux. De Bassora, il fit venir des médailles de cuivre, d’or et d’argent. Un sieur du Cap lui apporta des monnaies du Népal, des boîtes d’argent et reçut la mission de poursuivre toutes sortes de recherches. Le P. Joachim, à Patna, devait lui procurer les curiosités du pays et même celles de Delhi. Il voulait tout « de bon goût et rien de commun. » Dupleix revient volontiers sur ces expressions.

    B. N. 8979, lettre du 4 novembre 1731 ; 8980, lettres des 8 et 12 juin 1737 ; 8932, lettres du 15 janvier 1739 et du 5 février 1740. Ars. 4744. lettre du 15 décembre 1736.