Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/518

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que et même comme une injure personnelle la discussion de ses idées. Qu’est-ce que l’affaire des Jésuites et celle des roupies et celle de la subordination du Conseil de Chandernagor à celui de Pondichéry, sinon la manifestation faussée d’un amour-propre exagéré ? On peut regretter que son esprit n’ait pas été plus souple et plus conciliant ; mais on a connu des hommes plus grands encore, qui n’ont jamais pu admettre qu’on discutât leurs sentiments.

Chez Dupleix, ce rigorisme ou, comme disait Castanier, cette hauteur s’appuyait sur une grande honnêteté. Investi d’un poste de confiance où, s’il ne lui était pas interdit de songer à ses propres intérêts, il devait avant tout prendre la défense de ceux de la Compagnie, il se révoltait à la seule pensée qu’on pût le soupçonner d’intrigues contraires à son devoir et il avait horreur des misérables et des coquins qui ne parviennent qu’aux dépens des honnêtes gens. « L’homme attaqué, disait il, ne peut se défendre qu’avec vivacité ». Et il se défendait même avec violence. Son naturel impétueux le portait tout de suite aux idées extrêmes et il ne dédaignait pas les personnalités en rappelant les défauts ou les vices de chacun et en les mettant en lumière avec la satisfaction d’un justicier. Il poursuivait ses victimes de ses sarcasmes et de ses diatribes ; les mots les plus durs coulaient sous sa plume avec une extrême facilité : celui de coquin était un de ceux qu’il affectionnait. Le Conseiller Dirois fut son bouc émissaire ; mais à l’occasion il n’épargnait pas les gouverneurs eux-mêmes ; Lenoir, Dumas, la Bourdonnais furent tour à tour ou conjointement l’objet de ses anathèmes. Les femmes mêmes ne trouvaient pas grâce devant lui ; d’une façon générale il estimait qu’il était impossible de leur faire entendre raison ; elles avaient,