Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 2.djvu/155

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Ce succès encouragea Dirois, chef de notre comptoir, à demander à la mère de Bayanor, régente de Bargaret, de nous céder les deux montagnes dominant Mahé, que nous convoitions depuis dix ans. Il fut assez heureux pour pouvoir les obtenir le 1er janvier 1740 et l’ingénieur Paradis commença aussitôt à les mettre en état de défense. Les forts qu’on y édifia s’appelèrent le fort Condé et le fort Dauphin.

Cette nouvelle acquisition contrista les Anglais au delà de toute expression. Comme on s’attendait chaque jour à apprendre que la guerre était déclarée entre la France et l’Angleterre, Wake, chef de Tellichéry, ne se crut pas tenu à notre égard à beaucoup de ménagements et envoya plusieurs émissaires plus ou moins secrets dans l’état de Bargaret pour représenter aux notables indigènes que la cession des deux montagnes était une trahison de leurs intérêts ; il persuada la régente qu’elle avait commis une erreur, s’assura le concours du roi de Calastry et quand il jugea que nous étions hors d’état de nous défendre, ouvrit lui-même les hostilités le 22 juin, en s’emparant de la montagne d’Andalimalla, en arrière de Tellichéry, qui nous fermait le chemin de Cottiate.

Nous ne décrirons pas les différentes péripéties de cette lutte, où les Anglais déployèrent infiniment d’habileté pour nous combattre, tout en niant leur participation à la guerre. Il n’est rien qu’ils ne tentèrent pour débaucher nos alliés et pour nous susciter de nouveaux ennemis. Les hostilités se bornèrent d’ailleurs à l’occupation de quelques hauteurs et à divers faits d’armes de peu d’importance, mais assez graves pourtant pour paralyser notre commerce et nous engager dans des dépenses ruineuses, qui nous affaiblissaient peu à peu et risquaient de nous conduire à un désastre.