Page:Marty - Les principaux monuments funéraires.djvu/227

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LEGOUVÉ.




Legouvé (Gabrielle-Marie-Jean-Baptiste), membre de l’Institut de France et de la Légion d’Honneur, naquit à Paris en 1763. Dès sa première jeunesse il s’adonna tout entier à la poésie, et fit une étude toute particulière de l’art de la versification ; travaillant d’abord d’après les idées d autrui, il traduisit plusieurs fragmens de Lucain.

Le sujet de sa première tragédie lui fut fourni par Gessner : c’est dans ce poète pastoral qu’il puisa la Mort d’Abel ; et, chose singulière, le caractère le plus énergique qu’il ait jamais tracé, c’est celui de Gain. Cet ouvrage, écrit avec autant de vigueur que de grâce, obtint un grand succès. On ignore pourquoi les comédiens français ne le représentent plus. Cette peinture naïve des mœurs du premier âge du monde est de nature à plaire aux spectateurs de toutes les classes.

C’est un de ces sujets heureux dont les esprits les moins étendus et les moins instruits ont l’intelligence ; il inspire à la fois la terreur et la pitié, et commande même l’intérêt pour le criminel ; car enfin ce malheureux Caïn n’est criminel que par suite de sa jalousie, et sa jalousie n’est pas dénuée de fondement. Comme les héros de Sophocle et d’Euripide, Caïn est victime de la fatalité.

La Mort d’Abel fut jouée en 1792. En 1794, Legouvé donna Épicharis et Néron, autre tragédie qui obtint un succès plus brillant, mais moins mérité à quelques égards. Le plan de cet ouvrage n’est pas exempt de fautes graves ; mais ces défauts sont plus que compensés par des beautés du premier ordre, et surtout par un cinquième acte où les terreurs de Néron sont peintes avec une vérité sublime.

Quintus-Fabius est la troisième tragédie de Legouvé : cette pièce obtint aussi beaucoup de succès en 1795.

En 1798, il donna au théâtre de Louvois, où les acteurs du Théâtre-Français du faubourg Saint-Germain s’étaient réunis, une nouvelle tragédie intitulée Laurence. Cet ouvrage n’eut qu’un succès médiocre et n’a point été imprimé.

Étéocle et Polynice, cinquième tragédie du même auteur, a laissé des souvenirs plus profonds ; on y trouve de fort belles scènes. Les rôles d’Œdipe et d’Antigone y sont touchans et pathétiques ; mais malheureusement ils sont venus après l’Œdipe de Ducis.