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2. Production — Salaires — Profits


La conférence que le citoyen Weston nous a lue aurait pu être condensée « dans une coquille de noix ». Toute son argumentation aboutit à ceci : Si la classe ouvrière contraint la classe capitaliste à lui payer 5 shillings[1] au lieu de 4, sous forme de salaires en argent, le capitaliste lui rendra, par contre, sous forme de marchandises, la valeur de 4 shillings au lieu de 5. La classe ouvrière aurait alors 5 shil. à payer pour ce qu’elle achetait 4 shil. avant la hausse des salaires. Mais pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi le capitaliste ne donne-t-il que la valeur de 4 shil. pour 5 ? Parce que le niveau des salaires est fixe. Mais pourquoi est-il fixé à la valeur de 4 shil. de marchandises et pas 3 ou 2 shillings ou à une autre somme quelconque ? Si la hauteur du montant des salaires est fixée par une loi économique, si elle est indépendante aussi bien de la volonté des capitalistes que de celle des ouvriers, le citoyen Weston aurait dû tout d’abord exposer cette loi et la prouver. Il aurait dû, en outre, prouver que la somme des salaires effectivement payés à chaque moment donné correspond toujours exactement à la somme nécessaire des salaires et ne s’en écarte jamais. Si, d’autre part, la limite donnée de la somme des salaires dépend de la simple volonté du capitaliste ou des bornes de sa cupidité, c’est là une limite arbitraire. Elle n’a rien de nécessaire en soi. Elle peut être modifiée par la volonté des capitalistes et peut, par conséquent, l’être également contre sa volonté.

Pour illustrer sa théorie, le citoyen Weston vous raconte que, si une soupière contient une quantité déterminée de soupe qui doit être mangée par un nombre déterminé de personnes, une augmentation de la largeur des cuillers n’amènerait aucune[2] augmentation de la quantité de soupe.

  1. 1 shilling = 1, 25 (valeur d’avant-guerre).
  2. L’édition originale, en anglais, avait omis, par inadvertance, la négation.