Page:Marx et Engels - Le manifeste communiste, I.djvu/18

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seule et prodigieuse armée la totalité des ouvriers militants d’Europe et d’Amérique. C’est pourquoi elle ne pouvait pas prendre pour point de départ les principes déposés dans le Manifeste. Il lui fallait un programme qui n’exclût ni les trades-unions anglaises, ni les proudhoniens français, belges, italiens, espagnols, ni les lassalliens allemands[1]. Le programme présenté dans l’exposé des motifs qui précèdent les statuts de l’Internationale, fut rédigé par Marx avec une maîtrise reconnue même de Bakounine et des anarchistes. Le triomphe final des propositions émises dans le Manifeste, Marx ne l’a jamais attendu que du seul développement intellectuel de la classe ouvrière, que devait amener l’action commune et la discussion en commun. Les événements, les vicissitudes du combat contre le capital, les défaites plus encore que les victoires ne pouvaient manquer d’éclairer les combattants sur l’insuffisance des panacées, en lesquelles ils avaient cru jusqu’alors, et de préparer leurs esprits à une intelligence approfondie des conditions véritables de l’émancipation ouvrière. Marx eut raison de penser ainsi. La classe ouvrière, en 1874, quand l’Internationale fut dissoute, ne ressemblait en rien

  1. Lassalle lui-même, au cours de ses relations avec nous, n’a jamais manqué de se dire disciple de Marx ; et il va de soi qu’il se plaçait ainsi sur le terrain même du Manifeste. Il n’en va pas de même de ceux de ses adhérents qui s’en tenaient à son projet de coopératives de production commanditées par l’État, et qui divisaient toute la classe ouvrière en deux catégories : ceux qui demandaient l’aide de l’État et les partisans du self help. [Note de F. Engels].