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Page:Massé - À vau-le-nordet, 1935.djvu/165

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Chair du mollet


Une jeune lorette, native de l’Isle-aux-Grues, plus hydrogénée que gênée, morigénait, un jour, mon ami Eugène en ces termes :

— C’est singulier, mais on dirait que c’est lorsqu’ils sont devenus chauves que les hommes ont le plus de toupet.

Cette entrée en matière — on dirait plutôt une sortie ! — faisait présager, à l’adresse du sexe soi-disant fort, une mercuriale où nous pouvions bien écoper, Eugène et moi. Personnellement, je ne me sentais aucun tort vis-à-vis de la jeune personne, mais je me demandais si le brocard qu’elle venait de lancer, entre deux bouffées de cigarette, ne préludait pas à une pouille en règle pour mon ami.

Je savais la jeune femme d’humeur vive et pétulante et la tête près du bonnet — éveillée comme une potée de souris, m’avait souvent dit Eugène — et je redoutais quelque chichi, ne me souciant nullement de voir braqués sur notre trio, assis au Rond-de-Chêne si passant, les regards narquois et potiniers des badauds.

Eugène, heureusement, connaissait le tabac. Je savais qu’il ne regardait pas, lorsqu’il se sentait le moindrement coupable, à apaiser la colère de son amie en se laissant manger la laine sur le dos