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Page:Massé - Mena’sen, 1922.djvu/111

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vient inciser la berge ? Quelle est cette masse informe qui saille du milieu du fleuve ? Ne dirait-on pas un monstre aquatique, quelque tarasque tapie au fond du fleuve et dont la crête émerge ?

C’est Mena’sen, le redoutable dieu terme que, suivant la mythologie abénaquise, il faut, avant de passer outre, propitier par quelque sacrifice expiatoire. On dirait, en effet, dans la plaine liquide, un dolmen qui appète une victime.

Il y a, dans ce rocher qui troue la surface calme des eaux, quelque chose d’insolent qui menace et défie. Mena’sen a l’air rébarbatif, méchant, sinistre. Cette effervescence de vie qui l’entoure, ces effluves printaniers qui flottent dans l’air l’exaspèrent. Cette exubérance est contumélie qui le nargue. Le flot l’effleure de sa caresse mièvre sans l’émouvoir.

Il semble émaner de Mena’sen quelque fluide mystérieux et toxique qui sature l’âme de trémeur. L’absconse goétie du sked8a8asino abonde en maléfices sataniques : peut-être Mena’sen dégage-t-il, par quelque envoûtement horrible, les malédictions de la tribu qui là-bas implore Ni8askichi de faire périr les fugitifs.

Les bécassines fuient à tire d’ailes et les martins-pêcheurs, impudents maraudeurs pourtant, s’en écartent comme s’ils avaient soûleur !


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