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Page:Massé - Mena’sen, 1922.djvu/51

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L’incursion se dirigerait, au cœur même de l’hiver, sur la bourgade de Deerfield. Les coureurs des bois avaient rapporté que « Guarfil », ainsi qu’ils disaient, n’était défendu que par une palissade, isolé d’établissements importants, facile à embler d’assaut et, circonstance appréciable, pourvu de magasins assez considérables.

Il fallait, pour assurer le succès de l’entreprise, profiter de la saison rigoureuse, attaquer alors que les habitants n’étaient pas sur leurs gardes et que l’état des routes rendrait difficile sinon impossible l’envoi de renforts du poste le plus rapproché, Fort Orange, pour couper la retraite aux incursionnistes.

On confia la direction de ce hardi coup de main à Hertel de Rouville, chef éprouvé, qui commandait la confiance des Canadiens et le respect des Français.

De Rouville ne fut pas lent à combiner un plan d’invasion et à arrêter l’itinéraire qu’il fallait suivre en l’occurrence pour mener l’affaire à bien. Il se rendit compte qu’il lui faudrait une couple de cents hommes, habitués à ces courses et arrudis aux rigueurs des hivers canadiens. Aussi, sans perdre de temps, il dépêcha un hérault à son cousin Crevier, du fief de Saint-François, qui promit de lui fournir une centaine d’hommes tant Canadiens qu’Abénaquis. Lui-même, secondé par ses frères, ne tarda pas à rassembler un nombre égal de combattants.

Il fut arrêté que le parti remonterait le fleuve Alsiganteka ou Saint-François. On devait procéder par petites journées, puis, arrivé à Koattega, on obliquait à gauche, c’est-à-dire qu’on prenait la route que suivaient les coureurs des bois lorsqu’ils se rendaient à « Sainte-Mennefale » (Salmon Falls).