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MES SOUVENIRS
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Bien que très enfiévré par les répétitions d’Hérodiade, et fort dérangé par mes fréquents voyages à Bruxelles, je travaillais déjà à Manon au courant de l’été 1881.

Pendant ce même été, Meilhac était allé habiter le pavillon Henri IV, à Saint-Germain. J’allais l’y surprendre, ordinairement vers les cinq heures du soir, quand je savais sa journée de travail terminée. Alors, tout en nous promenant, nous combinions des arrangements nouveaux dans le poème. Ce fut là que nous décidâmes l’acte du séminaire et que, pour amener, au sortir de celui-ci, un contraste plus grand, je réclamai l’acte de Transylvanie.

Combien je me plaisais à cette collaboration, à ce travail où nos idées s’échangeaient sans se heurter jamais, dans le commun désir d’arriver, si possible, à la perfection !

Philippe Gille venait partager cette utile collaboration, de temps en temps, à l’heure du dîner et sa présence m’était si chère !

Que de tendres et doux souvenirs j’ai conservés depuis cette époque, à Saint-Germain, à sa magnifique terrasse, à la luxuriante frondaison de sa belle forêt !

Mon travail avançait lorsqu’il me fallut retourner à Bruxelles, au début de l’été 1882.

Pendant mes divers séjours à Bruxelles, je m’étais fait un ami délicieux en la personne de Frédérix, qui tenait avec une rare maîtrise la plume de critique dramatique et lyrique dans les colonnes de l’Indépendance belge. Il occupait dans le journalisme de son pays une situation très en vue; on l’appréciait hautement aussi dans la presse française.