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MES SOUVENIRS

plus ardent collaborateur, et, chose digne de remarque, il appréciait avec joie le respect que j’avais apporté à la déclamation de ses beaux vers.

Dans notre travail commun ainsi que dans nos études d’artistes au théâtre, j’aimais en lui ces élans de dévouement et d’affection, cette estime dans laquelle il me tenait.

Les représentations se succédèrent jusque dix fois par mois, fait unique dans les annales du théâtre pour un ouvrage nouveau, et cela se poursuivit ainsi jusqu’à la soixantième.

À ce propos on demandait à notre Perséphone, Lucy Arbell, combien de fois elle avait joué l’ouvrage, étant certain que sa réponse ne serait pas exacte. Évidemment, elle répondit : Soixante fois. — Non ! exclama son interlocuteur ; vous l’avez joué cent vingt fois, puisque vous avez toujours bissé l’air des roses !

Ce furent les nouveaux directeurs, MM. Messager et Broussan. auxquels je dus cette soixantième qui semble, jusqu’à ce jour, être la dernière de cet ouvrage dont l’aurore fut si brillante.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Quelle différence, je le dis encore, entre la façon dont mes ouvrages étaient montés depuis des années, avec ce qu’il en avait été à l’époque de mes débuts !

Mes premiers ouvrages devaient être représentés en province, dans de vieux décors, et il me fallait entendre de la part du régisseur, des paroles de ce genre : « Pour le premier acte, nous avons trouvé un vieux fond de la Favorite ; pour le second, deux châssis de Rigoletto, etc., etc. »