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MES SOUVENIRS
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crit sur le registre de la maison sous un nom d’emprunt, les médecins ayant craint les interviews, bien aimables d’ailleurs, qu’on m’aurait demandées et qu’il m’était tout à fait défendu d’accorder dans ces moments-là.

Le lit dans lequel je m’étendis était placé, par une toute gracieuse attention, au milieu de la plus belle chambre de l’établissement, dite le salon Borghèse. J’en fus ému.

Je fus l’objet, de la part du professeur chirurgien Pierre Duval et des docteurs Richardière et Laffitte, des soins les plus admirables et les plus dévoués.

J’étais là, environné d’un calme silencieux et comme enveloppé par une tranquillité dont j’appréciais tout le prix.

Mes plus chères amitiés venaient me rendre visite, chaque fois que l’autorisation leur en était donnée. Ma femme, tout inquiète, était accourue d’Égreville et m’apportait son affection la plus émue.

Je devais être sauvé au bout de quelques jours.

Le repos forcé imposé à mon corps n’empêchait cependant pas mon esprit de travailler.

Je n’attendis pas que le mieux se fît dans mon état pour m’occuper des discours que j’aurais à prononcer comme président de l’Institut et président de l’Académie des Beaux-Arts (double présidence qui m’était échue cette année) et enveloppé de glace, de mon lit, j’envoyais aussi mes instructions pour les futurs décors de Don Quichotte.

Enfin, je rentrai chez moi !

Revoir sa demeure, ses meubles ; retrouver les livres qu’on aimait à feuilleter, tous ces objets qui caressaient