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Le sault Saint-Louis et les autres rapides ne leur coûtent rien à passer ; le zèle et l’ardeur d’une si sainte expédition leur fait mépriser la rencontre des glaces, et le froid des eaux fraîchement fondues, dans lesquels il se jetaient vigoureusement, pour traîner eux-mêmes leurs canots entre les pierres et les glaçons. Ayant gagné le lac Saint-Louis, qui est au-dessus de l’Isle de Montréal, ils détournent à droite, dans la rivière qui mène aux Hurons et vont se poster au-dessous, du sault de la Chaudière, pour y attendre les chasseurs iroquois, qui, selon leur coutume, le doivent passer file à file, en retournant de leur chasse d’hiver.

Nos guerriers ne s’y furent pas plus tôt rendus, qu’ils furent aperçus par cinq Iroquois qui venaient à la découverte, et qui remontèrent en diligence pour avertir tous les chasseurs de se réunir et de quitter la posture de chasseur pour celle de guerrier. Le changement est bientôt fait ; la petite hache à la ceinture au lieu d’épée, le fusil à la pointe du canot et l’aviron en main, voilà l’équipage de ces soldats. Ils se rassemblent donc, et les canots chargés de deux cents Onnontagheronnons, s’étant joints, ils naviguent en belle ordonnance et descendent gravement le sault, au-dessous duquel, nos gens surpris d’une si prompte et si réglée démarche, se voyant bien plus faibles en nombre, se saisissent d’un méchant reste de fort, bâti en ce quartier-là depuis l’automne par nos Algonquins ; ils tâchent de s’y gabionner du mieux qu’ils peuvent.

L’Onnontagheronnon fait ses approches, et ayant reconnu l’ennemi, l’attaque avec furie ; mais il est reçu si vertement, qu’il est obligé de se retirer avec perte ; ce qui le fait songer à ses ruses ordinaires, désespérant d’en venir à bout par la force ; et afin d’amuser nos gens pendant qu’il appelle à son secours les Agniehronnons, qui avaient leur rendez-vous aux Isles de Richelieu, il fait semblant de vouloir parlementer. Les Algonquins et les Hurons semblent y vouloir prêter l’oreille, mais nos Français ne savent ce que