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CHAPITRE I

L’ENFANCE CALVINISTE

Le dimanche 14 mars 1728[1], le jeune Jean-Jacques Rousseau sortit après le prêche avec deux camarades, pour s’ébattre et polissonner dans la campagne genevoise. Ils s’attardèrent à leurs jeux, car Jean-Jacques était ardent et ne songeait plus au retour, une fois parti. Quand, le soir, ils atteignirent les remparts, le soleil venait de se coucher, et les soldats levaient le premier pont. La mésaventure n’était pas nouvelle[2]. Deux fois déjà Jean-Jacques avait passé la nuit à la belle étoile devant des portes fermées ; mais, le lendemain matin, à l’heure de la « découverte », quand il était rentré chez son patron, la correction avait été dure. Cette troisième étourderie devait être plus sévèrement punie, et il le savait. La fierté du jeune apprenti eut un sursaut de révolte. Il décida de ne pas rentrer en ville[3]. Il y reviendra un jour, papiste un peu honteux,

  1. Date très probable, comme on verra au chapitre suivant ; car, l’aventure ayant eu lieu le dimanche, et la première rencontre avec Mme de Warens le 21 mars, on jugera qu’une semaine dut suffire à Jean-Jacques pour aller de Genève à Confignon et Annecy.
  2. Elle arrivait souvent aux promeneurs du dimanche : cf. Du Bois-Melly [550], 159-160.
  3. Confessions, VIII. 28.