Page:Maupassant - Chronique, paru dans Le Gaulois, 9 juillet 1882.djvu/6

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damner ce parti pris de ne dépeindre que les surfaces attrayantes, que les apparences aimables ; mais, quand un écrivain est doué d’un tempérament qui ne lui permet d’exprimer que ce qu’il croit être la vérité, on ne le peut contraindre à tromper et à se tromper consciemment.

M. Francisque Sarcey s’irrite et s’étonne que la courtisane et la fille depuis une quarantaine d’années aient envahi notre littérature, se soient emparées du roman et du théâtre.

Je pourrais répondre en citant Manon Lescaut et toute la littérature pimentée de la fin du dernier siècle. Mais les citations ne sont jamais concluantes.

La vraie raison n’est-elle pas celle-ci : les lettres sont entraînées maintenant vers l’observation précise ; or la femme a dans la vie deux fonctions, l’amour et la maternité. Les romanciers, peut-être à tort, ont toujours estimé la première de ces fonctions plus intéressante pour les lecteurs que la seconde, et ils ont d’abord observé la femme dans l’exercice professionnel de ce pour quoi elle semblait née. De tous les sujets, l’amour est celui qui touche le plus le public. C’est de la femme d’amour qu’on s’est surtout occupé.

Et puis, il existe chez l’homme de profondes différences d’intelligence créées par l’instruction, le milieu, etc. ; il n’en est pas de même chez la femme, son rôle humain est restreint ; ses facultés