Page:Maupassant - Clair de lune, OC, Conard, 1909.djvu/13

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CLAIR DE LUNE.


Il portait bien son nom de bataille, l’abbé Marignan. C’était un grand prêtre maigre, fanatique, d’âme toujours exaltée, mais droite. Toutes ses croyances étaient fixes, sans jamais d’oscillations. Il s’imaginait sincèrement connaître son Dieu, pénétrer ses desseins, ses volontés, ses intentions.

Quand il se promenait à grands pas dans l’allée de son petit presbytère de campagne, quelquefois une interrogation se dressait dans son esprit : « Pourquoi Dieu a-t-il fait cela ? » Et il cherchait obstinément, prenant en sa pensée la place de Dieu, et il trouvait presque toujours. Ce n’est pas lui qui eût murmuré dans un élan de pieuse humilité : « Seigneur, vos desseins sont impénétrables ! » Il se disait : « Je suis le serviteur de Dieu, je dois connaître