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LE CRIME AU PÈRE BONIFACE.

mains sur le ventre, plié en deux, l’œil plein de larmes, avec d’affreuses grimaces autour du nez. Et les deux autres, affolés, le regardaient.

Mais comme il ne pouvait parler, ni cesser de rire, ni faire comprendre ce qu’il avait, il fit un geste, un geste populaire et polisson.

Comme on ne le comprenait toujours pas, il le répéta, plusieurs fois de suite, en désignant d’un signe de tête la maison toujours close.

Et son soldat, comprenant brusquement à son tour, éclata d’une gaieté formidable.

Le vieux demeurait stupide entre ces deux hommes, qui se tordaient.

Le brigadier, à la fin, se calma, et lançant dans le ventre du vieux une grande tape d’homme qui rigole, il s’écria :

— Ah ! farceur, sacré farceur, je le retiendrai l’crime au père Boniface !

Le facteur ouvrait des yeux énormes et il répéta :

— J’ vous jure que j’ai entendu.

Le brigadier se remit à rire. Son gendarme s’était assis sur l’herbe du fossé pour se tordre tout à son aise.

— Ah ! t’as entendu. Et ta femme, c’est-il comme ça que tu l’assassines, hein, vieux farceur ?