Page:Maupassant - Contes du jour et de la nuit 1885.djvu/351

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prendre. J’avais douze ans, seulement douze ans, tu te le rappelles bien, n’est-ce pas ? Et j’étais gâtée, je faisais tout ce que je voulais !… Tu te rappelles bien comme on me gâtait ?… Écoute… La première fois qu’il est venu, il avait des bottes vernies ; il est descendu de cheval devant le perron, et il s’est excusé sur son costume, mais il venait apporter une nouvelle à papa. Tu te le rappelles, n’est-ce pas ?… Ne dis rien… écoute. Quand je l’ai vu, j’ai été toute saisie, tant je l’ai trouvé beau, et je suis demeurée debout dans un coin du salon tout le temps qu’il a parlé. Les enfants sont singuliers… et terribles… Oh ! oui… j’en ai rêvé !

« Il est revenu… plusieurs fois… je le regardais de tous mes yeux, de toute mon âme… j’étais grande pour mon âge… et bien plus rusée qu’on ne croyait. Il est revenu souvent… Je ne pensais qu’à lui. Je prononçais tout bas :

« — Henry… Henry de Sampierre !

« Puis on a dit qu’il allait t’épouser. Ce fut