Page:Maupassant - L'art de gouverner, paru dans Le Gaulois, 1 novembre 1881.djvu/3

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Qui n’a été frappé de ce phénomène que beaucoup de rois ont régné d’une façon suffisante, sans déshonneur, bien qu’ils fussent les plus médiocres des êtres ? C’est qu’ils avaient, dès le berceau, appris l’art de manier les peuples, et ils ne commettaient aucune de ces petites maladresses qui démonétisent un homme bien plus vite que les grosses sottises de la politique extérieure.

Un peu de cette science pratique ne nuirait point à nos grands hommes modernes, à nos meilleurs, à nos plus rusés ; et le voyage de M. Gambetta en Normandie vient d’en donner un exemple frappant.



Tout le monde a lu déjà le livre exquis d’Alphonse Daudet, Numa Roumestan, l’œuvre la plus personnelle peut-être du romancier, où coule, intarissable, son esprit si particulier, aigu, mordant et souriant. Il a mis en opposition constante, tout le long de cette œuvre remarquable, l’homme du Nord et l’homme du Midi : celui-ci abondant, éloquent, remuant les foules à son gré ; celui-là calme, froid, raisonneur et calculateur. M. Gambetta, s’il n’est pas absolument un Roumestan, est, du moins, un Méridional, un vrai.