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LA FEMME DE PAUL.

connaît pas bien. » — Puis, soudain : — « Mais c’est monsieur Paul ! »

— Qui ça, monsieur Paul ? demanda son camarade. Le premier reprit :

— Mais monsieur Paul Baron, le fils du sénateur, ce p’tit qu’était si amoureux.

L’autre ajouta philosophiquement :

— Eh bien, il a fini de rigoler maintenant ; c’est dommage tout de même quand on est riche !

Madeleine sanglotait, tombée par terre. Pauline s’approcha du corps et demanda : — « Est-ce qu’il est bien mort ? — tout à fait ? »

Les hommes haussèrent les épaules : — « Oh ! après ce temps-là ! pour sûr. »

Puis l’un d’eux interrogea : — « C’est chez Grillon qu’il logeait ? » — « Oui, reprit l’autre ; faut le reconduire, y aura de la braise. »

Ils remontèrent dans leur bateau et repartirent, s’éloignant lentement à cause du courant rapide ; et longtemps encore après qu’on ne les vit plus de la place où les femmes étaient restées, on entendit tomber dans l’eau les coups réguliers des avirons.

Alors Pauline prit dans ses bras la pauvre Madeleine éplorée, la câlina, l’embrassa longtemps, la consola : — « Que veux-tu, ce n’est point ta faute, n’est-ce pas ? On ne peut pourtant pas empêcher les hommes de faire des