Page:Maupassant - La Vie errante.djvu/108

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Celui de Taormine est si merveilleusement placé qu’il ne doit pas exister, par le monde entier, un autre point comparable. Quand on a pénétré dans l’enceinte, visité la scène, la seule qui soit parvenue jusqu’à nous en bon état de conservation, on gravit les gradins éboulés et couverts d’herbe, destinés autrefois au public, et qui pouvaient contenir trente-cinq mille spectateurs, et on regarde.

On voit d’abord la ruine, triste, superbe, écroulée, où restent debout, toutes blanches encore, de charmantes colonnes de marbre blanc coiffées de leurs chapiteaux ; puis, par-dessus les murs, on aperçoit au-dessous de soi la mer à perte de vue, la rive qui s’en va jusqu’à l’horizon, semée de rochers énormes, bordée de sables dorés, et peuplée de villages blancs ; puis à droite, au-dessus de tout, dominant tout, emplissant la moitié du ciel de sa masse, l’Etna couvert de neige, et qui fume, là-bas.

Où sont donc les peuples qui sauraient, aujourd’hui, faire des choses pareilles ? Où sont donc les hommes qui sauraient construire, pour l’amusement des foules, des édifices comme celui-ci ?

Ces hommes-là, ceux d’autrefois, avaient une