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murailles supportant les deux principales promenades bordées de maisons, jaunâtres aussi, d’hôtels et de quelques palais modestes.

Seule, bâtie sur le quai même, coupant net sa ligne sinueuse, la petite chapelle de Santa-Maria della Spina, appartenant au style français du xiiie siècle, dresse juste au-dessus de l’eau son profil ouvragé de reliquaire. On dirait, à la voir ainsi au bord du fleuve, le mignon lavoir gothique de la bonne Vierge, où les anges viennent laver, la nuit, tous les oripeaux fripés des madones.

Mais par la via Santa-Maria on va vers la place du Dôme.

Pour les hommes que touchent encore la beauté et la puissance mystiques des monuments, il n’existe assurément rien sur la terre de plus surprenant et de plus saisissant que cette vaste place herbeuse, cernée par de hauts remparts qui emprisonnent, en leurs attitudes si diverses, le Dôme, le Campo-Santo, le Baptistère et la Tour penchée.

Quand on arrive au bord de ce champ désert et sauvage, enfermé par de vieilles murailles et où se dressent soudain devant les yeux ces quatre grands êtres de marbre, si imprévus de profil, de couleur, de grâce harmonieuse et