Page:Maupassant - Le Fantastique, paru dans Le Gaulois, 7 octobre 1883.djvu/12

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Des faits très simples prenaient parfois, en son esprit et en passant par ses lèvres, un caractère mystérieux. Il nous dit, un soir, après dîner, sa rencontre avec une jeune fille, dans un hôtel, et l’espèce de fascination que cette enfant exerça sur lui dès la première seconde ; il tâcha même de nous faire comprendre les causes de cette séduction, et il nous parla de la façon qu’elle avait d’ouvrir les yeux sans les fixer d’abord, et de ramener ensuite d’un mouvement très lent le regard sur les personnes. Il racontait le soulèvement de ses paupières, celui de la prunelle, le pli des sourcils, avec une si étrange netteté de souvenir qu’il nous fascina presque par l’évocation de cet œil inconnu. Et ce simple détail devenait plus inquiétant dans sa bouche que s’il nous eût dit quelque histoire terrible.