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sauvée

« — Que Madame ne craigne rien. Je ne résisterai que le temps nécessaire pour ne pas me déprécier.

« Au bout de huit jours, mon mari ne sortait presque plus. Je le voyais rôder toute l’après-midi dans la maison ; et ce qu’il y avait de plus significatif dans son affaire, c’est qu’il ne m’empêchait plus de sortir. Et moi j’étais dehors toute la journée… pour… pour le laisser libre…

« Le neuvième jour, comme Rose me déshabillait, elle me dit d’un air timide :

« — C’est fait, Madame, de ce matin.

« Je fus un peu surprise, un rien émue même, non de la chose, mais plutôt de la manière dont elle me l’avait dite. Je balbutiai : — Et… et… ça c’est bien passé ?…

« — Oh ! très bien, Madame. Depuis trois jours déjà il me pressait, mais je ne voulais pas aller trop vite. Madame me préviendra du moment où elle désire le flagrant délit.

« — Oui, ma fille. Tenez !… prenons jeudi.

« — Va pour jeudi, Madame. Je n’accorderai rien jusque-là pour tenir Monsieur en éveil.

« — Vous êtes sûre de ne pas manquer ?

« — Oh ! oui, Madame, très sûre. Je vais allumer Monsieur dans les grands prix, de façon à le faire donner juste à l’heure que Madame voudra bien me désigner.

« — Prenons cinq heures, ma bonne Rose.