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CLOCHETTE

Sont-ils étranges, ces anciens souvenirs qui vous hantent sans qu’on puisse se défaire d’eux !

Celui-là est si vieux, si vieux que je ne saurais comprendre comment il est resté si vif et si tenace dans mon esprit. J’ai vu depuis tant de choses sinistres, émouvantes ou terribles, que je m’étonne de ne pouvoir passer un jour, un seul jour, sans que la figure de la mère Clochette ne se retrace devant mes yeux, telle que je la connus, autrefois, voilà si longtemps, quand j’avais dix ou douze ans.

C’était une vieille couturière qui venait une fois par semaine, tous les mardis, raccommoder le linge chez mes parents. Mes parents habitaient une de ces demeures de campagne appelées châteaux, et qui sont simplement d’antiques maisons à toit aigu, dont dépendent quatre ou cinq fermes groupées autour.