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AU BOIS

— Votre femme ?

— Oui, Monsieur.

— Alors… alors… vous ne vivez donc pas ensemble… à Paris ?

— Pardon, Monsieur, nous vivons ensemble !

— Mais… alors… vous êtes fou, tout à fait fou, mon cher Monsieur, de venir vous faire pincer ainsi, en plein champ, à dix heures du matin.

Le mercier semblait prêt à pleurer de honte.

Il murmura :

— C’est elle qui a voulu ça ! Je lui disais bien que c’était stupide. Mais quand une femme a quelque chose dans la tête… vous savez… elle ne l’a pas ailleurs.

Le maire, qui aimait l’esprit gaulois, sourit et répliqua :

— Dans votre cas, c’est le contraire qui aurait dû avoir lieu. Vous ne seriez pas ici si elle ne l’avait eu que dans la tête.

Alors une colère saisit M. Beaurain et se tournant vers sa femme :

— Vois-tu où tu nous as menés avec ta poésie ? Hein, y sommes-nous ? Et nous irons devant les tribunaux, maintenant, à notre âge, pour attentat aux mœurs ! Et il nous faudra fermer boutique, vendre la clientèle et changer de quartier ! Y sommes-nous ?

Mme Beaurain se leva, et, sans regarder son