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ROUERIE

repris contenance, s’était assise et regardait en souriant ce juge. Elle répondit simplement :

— Non, je n’ai pas d’enfant.

— Nous savons aussi que vous n’avez jamais été en Italie.

Cette fois, elle se mit à rire tout à fait.

— Non, je n’ai jamais été en Italie.

Mon frère, abasourdi, reprit :

— Le comte m’a chargé de vous remettre cet argent et de vous dire que tout était rompu.

Elle reprit son sérieux, mit tranquillement l’argent dans sa poche, et demanda avec naïveté :

— Alors… je ne reverrai plus le comte ?

— Non, Madame.

Elle parut contrariée et ajouta d’un ton calme :

— Tant pis ; je l’aimais bien.

Voyant qu’elle en avait pris si résolument son parti, mon frère, souriant à son tour, lui demanda :

— Voyons, dites-moi donc maintenant pourquoi vous avez inventé toute cette ruse longue et compliquée du voyage et de l’enfant.

Elle regarda mon frère, ébahie, comme s’il eût posé une question stupide, et répondit :