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LE LIT

me suis aperçue de cela depuis trois jours. Rien n’est excellent hors du lit.

« Le sommeil n’est-il pas encore un de nos instants les meilleurs ?

« Mais c’est aussi là qu’on souffre ! Il est le refuge des malades, un lieu de douleur aux corps épuisés.

« Le lit, c’est l’homme. Notre Seigneur Jésus, pour prouver qu’il n’avait rien d’humain, ne semble pas avoir jamais eu besoin d’un lit. Il est né sur la paille et mort sur la croix, laissant aux créatures comme nous leur couche de mollesse et de repos.

« Que d’autres choses me sont encore venues ! mais je n’ai le temps de vous les marquer, et puis me les rappellerais-je toutes ? et puis je suis déjà tant fatiguée que je vais retirer mes oreillers, m’étendre tout au long et dormir quelque peu.

« Venez me voir demain à trois heures ; peut-être serai-je mieux et vous le pourrai-je montrer.

« Adieu, mon ami ; voici mes mains pour que vous les baisiez, et je vous tends aussi mes lèvres. »