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l’héritage

passaient d’une porte à l’autre, s’abordaient dans les couloirs.

Quand on sut l’affaire terminée, ce fut une déception générale. Quelqu’un dit : « Ça ne fait toujours pas un enfant à Lesable. » Et le mot courut. Un employé rima une chanson.

Mais, au moment où tout semblait fini, une difficulté surgit, soulevée par Boissel : « Quelle devait être l’attitude des deux adversaires quand ils se trouveraient face à face ? Se salueraient-ils ? Feindraient-ils de ne se point connaître ? » Il fut décidé qu’ils se rencontreraient, comme par hasard, dans le bureau du chef et qu’ils échangeraient, en présence de M. Torchebeuf, quelques paroles de politesse.

Cette cérémonie fut aussitôt accomplie ; et Maze, ayant fait demander un fiacre, rentra chez lui pour essayer de se nettoyer la peau.

Lesable et Cachelin remontèrent ensemble, sans parler, exaspérés l’un contre l’autre, comme si ce qui venait d’arriver eût dépendu de l’un ou de l’autre. Dès qu’il fut rentré chez lui, Lesable jeta violemment son chapeau sur la commode et cria vers sa femme :

« J’en ai assez, moi. J’ai un duel pour toi, maintenant ! »

Elle le regarda, surprise, irritée déjà.

« — Un duel, pourquoi cela ?

« — Parce que Maze m’a insulté à ton sujet. »