Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/311

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reprendre des bouts de vigne, des coins utiles à ses projets ; et il cherchait un moyen pratique et sûr de rendre définitives leurs conventions.

Une idée lui traversa l’esprit, le fit sourire d’abord, puis lui parut excellente, bien que bizarre.

— Si vous voulez, dit-il, nous allons écrire tout ça pour ne rien oublier plus tard ?

Et comme ils rentraient au village il s’arrêta devant le débit de tabac pour acheter deux papiers timbrés. Il savait que la liste des terres dressées sur ces feuilles légales prendrait aux yeux des paysans un caractère presque inviolable, car ces feuilles représentaient la loi, toujours invisible et menaçante, défendue par les gendarmes, les amendes et la prison.

Donc il écrivit sur l’une et recopia sur l’autre : « Par suite de la promesse de mariage échangée entre le comte Gontran de Ravenel et Mlle Louise Oriol, M. Oriol père abandonne comme dot à sa fille les biens désignés ci-dessous… » Et il les énuméra minutieusement, avec les numéros du registre cadastral de la commune.

Puis, ayant daté et signé, il fit signer le père Oriol, qui avait exigé à son tour la mention de la dot du fiancé, et il s’en alla vers l’hôtel portant le papier dans sa poche.

Tout le monde riait de son histoire, et Gontran plus fort que les autres.

Alors le marquis dit à son fils avec une grande dignité :