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nes il y a huit jours, à qui je faisais gagner deux mille francs.

L’animal, qui ne me reconnaissait pas, me dit en quittant la table :

― Vous avez de la chance, monsieur.

Je te lui réponds immédiatement :

― Dites, monsieur, que vous avez de la chance avec moi, et que je n’en ai pas avec vous.

Alors, je lui rappelle ma déconvenue d’il y a huit jours et je lui recolle mon manuscrit que j’avais dans ma poche.

― C’est insensé !

― Bonsoir, je cours de ce pas chez Brébant, où j’espère retrouver Bouton-de-Rose qui me recevra à bras ouverts, j’imagine, vu les espèces dont je suis porteur.

― Emmène-moi.

― Eh bien ! arrive, dépêchons ; je brûle de revoir l’infante.

― Allons ! messieurs, il faut que ça se termine, dit Barbaro en entrant dans la grande salle où l’horrible lumière du gaz éclairait encore les derniers groupes de joueurs rassemblés autour d’une table.

Parmi eux se trouvait le docteur Gédéon, avec qui nous n’avons pas encore fait connaissance. Le docteur Gédéon n’était pas un joueur proprement dit ; il n’apparaissait guère au tripot que pour y racoler quelques clients. Il était en train, pour le moment, de démontrer à un gros monsieur qu’il était menacé de la goutte sereine, à seule fin de provoquer une consultation dans son cabinet. En apercevant le marquis et Gaupin, il courut après eux et leur dit à l’oreille :

― Eh bien ! notre conciliabule ?