Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/89

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une lettre du roi, il refuse d’entrer avec lui dans la plus légère explication. Il manœuvre souterrainement toutefois, et pendant qu’il entre enfin en communication directe avec le roi, il prodigue les faux serments et les protestations. Il répète à Ludlow qu’il faut vivre et mourir pour la république ; il met sa main dans celle de l’inflexible Haslerig, en jurant par le Dieu vivant de s’opposer jusqu’au dernier soupir à l’élévation de Charles Stuart ou de tout autre.

Et c’est ainsi qu’il devint duc d’Albemarle avec quatre-vingt mille livres sterling.

La duplicité est certainement une excellente chose, mais encore ne faut-il pas se prendre dans ses propres filets, ce qui arrive. Il faut quelquefois ne pas vouloir tromper, c’est là le difficile.

DE LA MÉCHANCETÉ CALCULÉE.

Les théologiens montrent une profonde connaissance de la nature humaine quand ils représentent Dieu comme un être infiniment bon, mais surtout comme infiniment redoutable. C’est là le côté essentiel, car le mal est quelque chose de plus palpable que le bien. Les raisons de craindre sont plus frappantes que celles d’espérer ; enfin le mal paraît aux hommes une plus grande expression de la force que