Page:Maurois - Les Silences du colonel Bramble (Grasset 1918).djvu/168

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Aurelle, sans pouvoir trouver un mot, serra la main de cet enfant mutilé qui avait tant aimé la guerre, et les brancardiers s’éloignèrent doucement.

En arrivant au château, il trouva les visages toujours calmes, mais très sombres : il rendit compte de sa mission au chef d’état-major, qui le remercia distraitement.

— Est-ce que cela marche ? demanda-t-il tout bas au téléphoniste.

— Oui, grommela l’homme… Tous objectifs atteints… mais le général tué… A voulu aller voir lui-même pourquoi la deuxième brigade n’avançait pas… un obus l’a enterré avec le major Hall.

Aurelle imagina les cheveux gris également divisés, les traits fins du général, l’or et la pourpre des parements souillés par la boue ignoble des batailles. « Tant de dignité aisée, pensait-il, tant d’autorité courtoise, et demain une charogne que les soldats fouleront