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sur les bords du nil

Nous étions arrivés au petit pont, où les pilotes et une partie de l’équipage devaient descendre, car ils n’étaient plus nécessaires ; cependant je ne voyais pas Hassan mettre à l’ancre.

« Ne nous arrêtons-nous pas ? demandai-je.

— Non ; je vais débarquer les hommes, puis nous virerons de bord.

— Et pourquoi ?

— De peur de la police.

— Je ne la crains guère.

— Parce que tu es étranger et sous la protection de ton consul ; mais…, tiens ! les voilà ! »

En effet, un canot, monté par des hommes, se dirigeait vers nous.

« Attends-les, dis-je à Hassan, je suis bien aise de faire connaissance avec les cabassers. »

Les policiers furent bientôt à bord. Le sandal, rentré au port avant nous, avait semé sur notre compte les bruits les plus injurieux. Khalid ben Mustapha, comme nous l’apprîmes depuis, était allé, aussitôt débarqué, porter plainte chez le juge, m’accusant de meurtre, de brigandage, de séduction, de révolte, etc. etc., me signalant comme le plus vil des giaours. La corde et le sac à vipères lui semblaient trop peu pour châtier mes forfaits. D’ailleurs, il croyait Abrahim mort et agissait en son nom personnel.

La justice, dans ce pays, n’a pas même idée d’une enquête ; elle est sommaire et expéditive, je ne l’ignorais pas.

« Quel est le patron de ce navire ? interrogèrent les hommes de la police.

— Moi.

— Comment t’appelles-tu ?

— Hassan Abou el Reïsan.

— N’as-tu pas sur ton vaisseau un effendi hékim (médecin) infidèle ?

— Oui, le voilà ; il se nomme Kara ben Nemsi ; la dahabïe lui appartient jusqu’au Caire.

— N’as-tu pas aussi une femme à bord ?

— Oui, elle est dans la cabine.

— En ce cas, nous vous faisons tous prisonniers ; vous allez être conduits chez le juge ; le vaisseau restera sous notre garde. »