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les pirates de la mer rouge

— Chameaux, c’est cela ! Je voudrais tâter du chameau ; est-ce agréable ?

— Hum ! vous éprouverez dans le commencement quelque chose comme le mal de mer. Prenez de la créosote, et encore cela n’y fera pas grand’chose.

— M’accompagnez-vous ?

— Volontiers.

— Nous n’irons pas loin. Emmenez votre domestique ; dans ce pays on n’est sûr de rien.

— Soit ! Si vous allez chercher le chameau, faites attention à la selle et à la couverture. Il y a là souvent une population à laquelle les Orientaux donnent le nom gracieux de bit ; heureusement ces peuples de myrmidons sont tellement attachés aux Arabes, qu’ils dédaignent souvent les giaours ; mais nous avons affaire à deux peuplades, celle de l’arabe et celle du chameau. Vous me comprenez ? Le mieux serait de prendre votre propre couverture et de la faire passer au four en rentrant, cela vous coûtera une piécette chez le premier boulanger venu. N’oubliez pas vos armes surtout.

— Sont-elles bien nécessaires… hum ?

— Les miennes ne me quittent jamais, en ce moment surtout.

— Pourquoi en ce moment ?

— Parce que j’ai fait connaissance avec un certain pirate, pèlerinant en ce moment, et peu agréable à rencontrer.

— Vous ne m’avez pas dit cela hier.

— Bah ! vous m’auriez pris pour un hâbleur. On ne croit plus aux aventures dans le siècle où nous sommes. Dernièrement un brave savant me soutenait que jamais la vie n’avait été plus monotone. Il prétend qu’on peut parcourir tout l’ancien monde sans rencontrer le moindre incident. A mon avis cela dépend de la manière de voyager. Il va sans dire qu’un voyage circulaire par entreprise n’offre pas de péripéties, vous conduirait-il à Ceylan ou à la Terre de feu.

« Mais je préfère le cheval et le chameau aux chemins de fer, la petite barque de l’indigène aux steamers, et je vais plus volontiers à Tombouctou qu’à Nice. Je n’ai ni interprète ni courrier. Halef me suffit, et je dépense moins d’argent pour un voyage en Turquie que bien d’autres pour une saison de bains.

« J’ai visité l’Amérique et ses déserts non en milord, mais en