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une bataille au désert


« Salam aléïkoum ! Que faites-vous ici ? nous demanda l’un des cavaliers.

— De quelle tribu es-tu ? repartis-je.

— De la tribu des Haddedîn, qui appartient à la race illustre des Chammar.

— Comment se nomme ton cheikh ?

— Son nom est Mohammed Emin.

— Se trouve-t-il loin d’ici ?

— Non ; veux-tu le voir ? Viens avec nous. »

Les Bédouins firent un long détour en s’écartant, pour arriver à nous rejoindre ; décrivant une courbe, ils mirent une véritable coquetterie à nous montrer leur art suprême : l’art de monter à cheval. Le grand point de l’équitation pour eux est d’arrêter court sa monture au milieu d’une course effrénée. Mais, par là même, les chevaux arabes deviennent aisément ombrageux et vicieux.

Je ne crois pas d’ailleurs que ces peuples puissent se vanter d’être les premiers cavaliers du monde, comme ils se l’imaginent : les Indiens les surpassent de beaucoup. Cependant mon compagnon de voyage semblait enchanté de cette voltige ; il criait :

« Admirable ! admirable ! Ah ! je n’en ferais pas autant… Non ! je me casserais le cou.

— J’ai vu mieux ! lui dis-je. »

— Oh ! et où donc ?

— En Amérique, dans les forêts vierges, sur les fleuves gelés, dans les cagnons (défilés de montagnes), quand on les traverse avec des chevaux non ferrés.

— J’irai en Amérique, master ! J’aime beaucoup les aventures, moi ! Mais que disent ces gens ?

— Ils nous saluent, ils s’informent du but de notre voyage, offrent de nous conduire vers leur chef Mohammed Emin, le cheikh des vaillants Haddedîn.

— Ces hommes sont vaillants ?

— Tous les Arabes se disent très braves et le sont dans une certaine mesure, ce qui n’a rien de surprenant : ils ne s’occupent d’aucune industrie, d’aucune agriculture, d’aucun commerce, d’aucun art. Ils laissent aux femmes tous les travaux de campement ; du matin au soir ils ne font autre chose que de chevau-