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sur les bords du nil


soit l’honneur ! Cependant, si je dois essayer de t’aider en quelque chose, explique-toi. »

Cette question directe par laquelle je prétendais pénétrer ses secrets d’intérieur sembla contrarier Abrahim ; il devait pourtant s’y attendre. Dissimulant cette faiblesse, il répondit avec gravité :

« Tu es du pays des infidèles : il n’y a point de honte chez vous à parler de celles qui sont nos mères ou nos filles ? »

Je souriais malgré moi de l’art déployé par le musulman pour en arriver à ne pas prononcer le nom de sa femme, mais je cherchai à paraître aussi grave que lui. Je repris froidement :

« Tu demandes mon secours et tu m’insultes !

— En quoi ?

— Tu nommes ma patrie le pays des infidèles !

— N’êtes-vous pas des infidèles ?

— Nous croyons à un Dieu ; ce Dieu est le même que celui que vous appelez Allah. A ton point de vue je suis un infidèle, comme tu en es un au mien. J’aurais le droit de te donner ce nom ; je m’en abstiens, parce que je suis Nemsi et que nous ne blessons jamais les lois de la politesse.

— Laissons ces questions de religion. Écoute seulement : un fils de Prophète ne doit jamais parler de sa femme, mais tu me permets de parler des femmes du Frankistan ?

— Oui, certes.

— Quand la femme d’un Frank est malade… » Il me regardait avec inquiétude, comme si j’allais l’interrompre ; je fis un signe de tête, il poursuivit : « Enfin, quand elle est si malade qu’elle ne peut prendre aucune nourriture…

— Aucune ?

— Non, pas la moindre…

— Continue.

— Quand l’éclat de ses yeux s’éteint, quand ses joues s’amaigrissent, quand la fatigue l’accable sans qu’elle puisse pourtant dormir…

— Continue.

— Quand elle va traînant et sans forces, tantôt glacée, tantôt brûlante…

— Je comprends, continue.

— Quand le plus petit bruit la fait frissonner, quand elle ne