Page:Maynial - La Vie et l’Œuvre de Maupassant, 1907.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de canotier ; il en a conté une anecdote puérile et touchante, il a mis en scène, sous les surnoms qu’ils s’étaient donnés, de joyeux amis qui n’ont eu aucune peine à se reconnaître et qui ont confirmé son récit par leurs propres souvenirs[1]. Nous ne rappellerons pas le sujet de la nouvelle ; nous n’en évoquons le souvenir ici que pour y chercher l’expression la plus exacte de la vie de Maupassant à cette époque. Lui-même nous présente cette bande de cinq chenapans, — l’expression est de lui, — devenus plus tard des hommes graves ; il nous introduit dans cette « affreuse gargote d’Argenteuil, dans cette colonie inexprimable qui ne possédait qu’une chambre-dortoir », et où il avouait avoir passé les plus folles soirées de son existence[2].

Nous n’avions souci de rien, dit-il, que de nous amuser, et de ramer, car l’aviron pour nous, sauf pour un, était un culte. Je me rappelle de si singulières aventures, de si invraisemblables farces… que personne aujourd’hui ne les pourrait croire. On ne vit plus ainsi aujourd’hui, même sur la Seine, car la fantaisie enragée qui nous tenait en haleine est morte dans les âmes actuelles. À nous cinq nous possédions un seul bateau, acheté

  1. Voir surtout les souvenirs de M. Léon Fontaine, rapportés par A. Brisson (Temps du 7 décembre 1897), ceux d’Henry Céard, la Toque et Prunier (dans l’Événement du 22 août 1896), ceux de M. Robert Pinchon (dans une lettre publiée par A. Lumbroso, op. cit., p. 132), ceux de M. Charles Lapierre, ibid., p. 608.
  2. Mouche, édit. ill. Ollendorff, pp. 117-118.