Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/178

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les nomades de l’Arabie furent lancés sur l’Occident. Lorsque Tarik, le célèbre lieutenant du khalife, traversant le détroit qui rappelle son nom, préparait la fondation des royaumes mauresques de l’Espagne, il apportait à la grande Méditerranée européenne le tribut légitime de sa modeste rivale de l’Orient. Les croisades représentent la contrepartie chrétienne de ce grand courant du moyen âge, mais aucune des dominations frankes dans le Levant n’eut les destinées glorieuses des États musulmans de Valence, de Grenade et de Cordoue.

Géographiquement, l’Europe continentale se rattache à la Méditerranée par le littoral de la Provence, et c’est par l’influence latine dans la Gaule narbonnaise qu’elle débute aussi dans l’histoire collective du genre humain. Mais, jusqu’au moyen âge, ses peuples ne figurent dans les annales du monde que suivant la part de chacun aux grandeurs ou à la décadence de l’empire méditerranéen, unifié par « la paix romaine » ; pendant le moyen âge, ils ne vivent dans l’histoire que par les épaves plus ou moins nombreuses qu’ils avaient su recueillir dans le grand naufrage. Leur culte est gréco-sémite[1], leur poli-

  1. Cf. E. Havet, Le Christianisme et ses origines. Il me semble pourtant que l’auteur de cet excellent ouvrage exagère encore l’apport du peuple juif à la religion chrétienne et ne fait pas ressortir sous son vrai jour son origine méditerranéenne. Diverses sectes gnostiques, qu’on croit postérieures au christianisme, seraient plutôt de curieux restes de ce mysticisme méditerranéen auquel, de tous les peuples de l’empire, les Juifs palestiniens semblent seuls avoir résisté jusque vers le Ier siècle de l’ère vulgaire ; avec