Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tellement synonymes qu’entre le militarisme et l’économisme dont parle Spencer, il serait bien difficile de faire un départ tant soit peu équitable. Tantôt les triomphes de l’aristocratie élèvent le cens oligarchique, tantôt les victoires du peuple parviennent à l’abaisser. Mais la plus pure des démocraties classiques, la démocratie athénienne, comme plus tard la commune du popolo magro de Florence, n’a été qu’une oligarchie à peine déguisée. Athènes, dans ses jours glorieux, comptait plus d’esclaves que de citoyens, et la liberté des bourgeois florentins avait pour corrélatif nécessaire l’asservissement des populations rurales de la Toscane.

Le principe oligarchique, celui d’une différenciation politique et sociale basée sur les hasards de la possession ou de la victoire, et que l’on cherchait vainement à perpétuer par l’hérédité, ce principe constituait l’éclat et la misère, la force et la faiblesse des républiques de la période intermédiaire. Chaque progrès nouveau réalisé au sein de ces sociétés avait pour conséquence forcée un écart toujours croissant des conditions ou des fortunes ; l’accroissement du nombre des vaincus et des pauvres conduisait fatalement à cette tyrannie pisistratide ou césarienne qui, tout en étant l’œuvre du progrès, n’en constituait pas moins une réaction, par un retour atavique vers le despotisme de l’antiquité extra-européenne, ou une dissolution, car on n’avait point encore de principe supérieur à substituer à l’oligarchie.