Page:Meilhac et Nuitter - Vert-Vert.pdf/28

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BALADON.

Croyez-vous ?

PATURELLE.

J’en suis tout à faire sûre ?

BALADON.

Vous avez raison, chère ! Il ne faut pas compromettre votre place ! ah ! si la danse allait mieux, je vous dirais…

PATURELLE.

Qu’est-ce que vous me diriez ?

BALADON.

Mettons le pied gauche en avant ! voilà ce que je vous dirais. Mettons le pied gauche en avant, et partons ensemble ; je vous initierai aux secrets de mon art, et nous ferons fortune en dansant tous les deux. Mais il n’y faut pas songer : la danse est un état perdu ! Ce n’est plus une science, ce n’est plus même un art, c’est un plaisir. Ah ! où est le temps où je dansais les Zéphirs au Grand Opéra.

PATURELLE.

Vous deviez être beau.

BALADON.

Écrasant, ma chère ! j’étais écrasant ! Mais ils ont eu la petitesse de me réformer parce que, moi, je tenais aux principes, et que la danse d’aujourd’hui ne les admet pas, les principes. Alors, ils m’ont dit : vous, vous tenez aux principes ; nous autres, nous n’en voulons plus ; cela étant, ce que vous avez de mieux à faire, est de… Alors… j’ai mis le pied gauche en avant et je suis parti… Je suis revenu dans le Nivernais, mon pays natal, et j’ai été nommé professeur de danse des pensionnaires de Saint-Remy : C’est alors que je vous ai connue… vous ! C’est alors…

Il veut lui prendre la taille.

PATURELLE.

Encore ! (S’échappant.) Moi aussi, monsieur, je tiens aux principes.

BALADON.

Ai-je des droits ?

PATURELLE.

Je vous ai déjà dit !