Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 139 )

bloit annoncer la catastrophe la plus désastreuse. De gros nuages noirs, je me le rappelle, planoient sur la triste cité.

Cette rue fort large en apparence, se terminoit comme un entonnoir. Des rigoles, des trous, des pierres de taille, plusieurs équipages, rendirent le passage étroit & dangereux.

Tout-à-coup je me sentis horriblement pressé. Je perdis la liberté de respirer, & je fus porté en l’air près de quatre minutes, par les flots tumultueux d’un peuple qui avoit à la lettre l’impétuosité d’un torrent.

Jeté dans l’angle d’un mur qui me sauva la vie, j’eus le bonheur, après de longs efforts, de rétrograder, malgré des avis contraires ; mais je me rappellai à propos que le matin j’avois vu des pierres de taille dans cette rue spacieuse, & cette réflexion me détermina à revenir sur mes pas. Une charpente brûloit près du feu d’artifice tiré, & le singulier effet de cet incendie m’entraîna encore d’un côté opposé à la mort.