Page:Metzger - Les doctrines chimiques en France du début du XVII à la fin du XVIII siècle, 1923.djvu/364

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
362
les doctrines chimiques en france

C. — Parmi les notions fondamentales de la chimie qui changèrent complètement d’aspect, il faut citer tout d’abord la théorie de la nature du feu qui servait de clef de voûte à la méthode expérimentale. Tous les corps que les chimistes soumettaient à l’analyse devaient, en effet, subir, sous une forme quelconque, l’épreuve du feu. Que ce dernier soit utilisé à chauffer plus ou moins fort, à fondre ou à provoquer des dissolutions, à dessécher, à vaporiser, à distiller, à brûler, il jouait , dans la chimie duxv1f siècle, un rôle vraiment prépondérant, et les travailleurs voulurent connaître aussi bien quelle était sa nature, que la signification des transformations qu’il produit.

    l’élément de l’eau, non pas abstractivement, mais tel qu’il est réellement, c’est-à-dire si nous concevons l’eau dont Moïse parle comme imprégnée de différentes parties ; ou plutôt si par le nom d’eau nous comprenons dama un sens plus étendu toute matière fluide. Ainsi, non seulement les poissons nageront dans, l’eau, mais les oiseaux voleront aussi dans l’eau. Les cieux même en hébreu שמים Schamain, mot qui paraît composé de אש et מים, feu et eau, pourraient être regardés comme du feu et de l’eau, quoique leur extrême subtilité puisse les faire comparer au vide. Le feu même est fluide. Peut-être même que les partisans de l’eau dont nous avons parlé, ont équivoque sur le mot eau. Dans ce sens, Thalès entendra par là son eau ; Héraclite son feu, Épicure et Démocrite leurs atomes, et même Aristote son sujet commun dont toutes choses se font ; les cartésiens, enfin, entendront par ce mot leur Étendue divisée en petites parties, pourvu que l’on se renferme dans les bornes du tourbillon de la terre. » Nous avons tenu à reproduire ce paragraphe pour montrer, tout d’abord, combien il est difficile de distinguer l’hypothèse a priori de l’induction expérimentale : pour établir ensuite que ces points de vue divers se réunissaient et se fortifiaient mutuellement en formant un seul système ; enfin, pour rendre sensible qu’il est possible de ramener les unes aux autres les différentes doc trines scientifiques, si, comme le fait Scheuchzer, on se permet « d’équivoquer » sur la définition de leurs termes essentiels.