Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 9.djvu/68

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criait , en les nommant, que leur rançon était arrivée ; et à mesure qu’ils sortaient, il les faisait massacrer. Il en avait déjà fait périr environ cinquante de cette manière, lorsque les autres s’en étant aperçus, ne voulurent plus sortir ; alors il fit mettre le feu au bois, et ils y périrent tous. Il marcha sur-le-champ vers Argos, espérant prendre cette ville sans défense ; mais Télésille, non moins célèbre par son courage que par son talent poétique, ayant confié la garde des murs aux vieillards, aux enfants et aux esclaves, fît prendre aux femmes qui étaient dans la force de l’âge, les armes consacrées dans les temples, les rangea en bataille, et alla au-devant des Lacédémoniens ; Cléomènes, considérant qu'une victoire emportée sur des femmes serait peu glorieuse, et qu’une défaite serait une tache ineffaçable, prit le parti de se retirer. Il fut ensuite chargé par les Spartiates de chasser d’Athènes les fils de Pisistrate et de rendre la liberté aux Athéniens, et cette expédition fut couronnée du succès. Quelque temps après, voulant favoriser Isagoras, il fit chasser d’Athènes Clisthènes et un grand nombre d’autres citoyens ; il aida même Isagoras à s’emparer de la citadelle ; mais les Athéniens l’ayant bloqué sur-le-champ, il fut obligé de capituler. De retour à Sparte, il décida les Lacédémoniens à déclarer la guerre aux Athéniens ; ce qu’ils firent d’autant plus volontiers que, voyant l’accroissement de la puissance de ce peuple, et connaissant son caractère remuant, ils pensaient, et peut-être avec raison, qu’il était important pour la sûreté de la Grèce, qu’ils fussent soumis au gouvernement monarchique. Ils firent donc revenir les Pisistratides, et envoyèrent les deux rois avec une armée considérable pour les rétablir sur le trône ; mais les alliés, dès qu’ils surent qu’il s’agissait de replacer des tyrans à Athènes, se retirèrent. Démarate, roi de l’autre branche, en fit de même, et emmena une partie de l’armée lacédémonicnne. Cléomènes, alors, se voyant trop faible pour entreprendre quelque chose, fut obligé de retourner à Sparte. L’Ionie s’étant soulevée contre Darius, l’an 503 avant J.-C. , Aristagoras vint à Lacédémone pour tâcher d’obtenir des secours, et il fit tout ce qu’il put pour séduire Cléomènes, mais il n’y réussit pas. Les Ioniens étant soumis, Darius envoya des hérauts chez tous les peuples grecs demander la terre et l’eau. Beaucoup d’insulaires rendirent cet hommage, et de ce nombre furent les Éginètes. Les Athéniens s’étant portés leurs accusateurs, les Lacédémoniens envoyèrent Cléomènes à Égine pour punir ceux qui avaient dirigé le peuple en cette occasion ; mais les principaux Éginètes s’y étant opposés, Démarate prit leur parti, et fit rappeler Cléomènes, dont il était jaloux. Ce dernier, pour s’en venger, engagea Léotychides à disputer le trône à Démarate, sons prétexte qu’il n’était pas fils d’Ariston. Comme cette assertion paraissait avoir quelque fondement , les Lacédémoniens envoyèrent consulter l’oracle de Delphes, et la Pythie, séduite d’avance par Cléomènes, répondit conformément à ses vues. Démarate fut donc détrôné, et Léotychides devint roi à sa place. Il suivit Cléomènes à Égine, et les deux rois, de concert, firent arrêter dix des principaux qu’ils envoyèrent prisonniers à Athènes. Les machinations de Cléomènes contre Démarate étant venues dans la suite à la connaissance des Lacédémoniens, il ne voulut pas s’exposer à leur colère, et s’enfuit dans la Thessalie. Il revint peu après dans