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ACU

successivement recteur du collège des jésuites de Cuença, au Pérou, et professeur de théologie morale, il fut choisi, en 1638, par le conseil de Lima, pour accompagner le général portugais Texiera dans son entrepris pour reconnaître le fleuve de l’Amazone jusqu’à sa source. Ce voyage avait aussi pour objet d’ouvrir la communication du Brésil au Pérou. D’Acuna eut pour collègue le P. André d’Artieda, professeur en théologie. Ayant reçu de la chancellerie de Quito des instructions particulières, et l’ordre de repasser en Espagne après son voyage, pour rendre compte au roi de ses observations, il partit de cette ville au mois de février 1639, avec le général portugais, s’embarqua sur sa flottille qui avait remonté l’Amazone, et il n’arriva a l’embouchure du fleuve et dans la ville de Para qu’après neuf mois de navigation. Dans le cours de ce voyage célèbre, le P. d’Acuna reconnut de nouvelles peuplades d’indiens, et très-peu d’anthropophages ; il tira des informations curieuses des fameux Topinambous, originaires du Brésil, qu’il ne fit pas difficulté de comparer aux peuples les plus distingués de l’Europe. Les Topinambous confirmèrent au P. d’Acuna qu’il existait de vraies amazones, dont le fleuve a tiré son nom. Les preuves que ce jésuite apporta en faveur d’un fait si longtemps douteux furent ensuite adoptées par le savant Condamine, et fortifiées par ses propres recherches. Le jésuite observateur désigna l’île du Soleil, à l’embouchure de l’Amazone, comme la clef du fleuve et de tout le pays, et proposa à son gouvernement d’y établir deux forteresses. C’est par ce résultat politique de ses observations que le P. d’Acuna termina la relation historique de son voyage, qui eut pour témoins et pour garants plus de trente Espagnols et Portugais. Il la publia à Madrid, en 1641, avec permission du roi, immédiatement après son retour dans cette capitale et sous ce titre : Nuevo Descrubrimiento del gran rio de las Amazones, in-4o. Il donne dans cet ouvrage une longue description, et il y parle beaucoup des amazones, non point comme en ayant vu lui-même, mais sur la foi de gens dont il assure qu’il n’est pas possible d’infirmer le témoignage. Tous les projets de l’Espagne sur la communication entre le Pérou et le Brésil s’évanouirent des que la maison de Bragance fut sur le trône. Il y avait lieu de craindre que la relation du P. d’Acuna n’apprit aux Portugais à remonter l’Amazone jusqu’à sa source. Cette considération détermine Philippe IV à faire enlever tous les exemplaires. Ils devinrent si rares, que, vingt ans après, on n’en connaissait que deux : celui qui était dans la bibliothèque du Vatican, et un autre appartenant à Marin Leroi de Gomberville, qui le traduisit de l’espagnol en français, sous ce titre : Relation de la rivière des Amazones, Paris, 1682, 2 vol. in-12, avec une dissertation curieuse ; mais, dans plusieurs passages, Gomberville n’a pas rendu fidèlement le texte. Cette traduction a été réimprimée dans le tome second de la Croisière autour du monde de Woode Rogers. Le P. d’Acuna fit ensuite un voyage à Rome, en qualité de procureur du collège de sa province, et il revint en Espagne, avec l’emploi de qualificateur de l’inquisition. Après y avoir demeuré quelques années, il retourna aux Indes occidentales. Il était, en 1675, à Lima, au Pérou, où il est mort sans qu’on sache précisément dans quelle année. B-p.


ACUNA. Voyez Cunha (Da).


ACUSILAS ou ACUSILAUS, historien grec, né à Argos, vivait, selon Josèphe, un peu avant l’expédition de Darius contre la Grèce, et vers le temps où Cadmus de Milet écrivit le premier l’histoire en prose. L’ouvrage d’Acusilas était intitulé : les Généalogies, parce qu’il y rapportait celles des principales maisons de la Grèce. Suidas prétend qu’il les avait tirées de quelques inscriptions gravées sur des tables de bronze que son père avait trouvées en fouillant la terre dans un coin de sa maison. Mais Josèphe et Clément d’Alexandrie disent qu’il les avait tirées d’Hésiode. Il faisait commencer lu temps historiques à Phoronée, fils d’Inachus, et il comptait 1020 ans depuis lui jusqu’à la première olympiade, l’an 776 avant J.-C. Il ne nous en reste que des fragments recueillis par Sturz, qui les a placés à la fin de ceux de Phérécydes ; Geræ, 1798, in-8o. Plusieurs auteurs ont cité les Généalogies d’Acusilas, et quelques-uns l’ont mis au rang des sept sages, au lieu du tyran Périandre. C-r.


ACUTO (Jean), dont le nom véritable était Hawkwood, célèbre condottière anglais, rassembla une bande d’aventuriers en Angleterre et en France, et en forma la redoutable compagnie anglaise blanche, dont il vendit successivement les services à plusieurs princes et républiques d’Italie. Envoyé, en 1565, par Barnabos Visconti, au secours de Pise, réduite aux abois par Florence, il contribua, par la crainte qu’il inspirait, ainsi qu’un autre aventurier, Anichino Baumgarten, à la paix qui fut signée le 17 août entre les deux villes rivales ; puis, l’année suivante, il devint l’instrument le plus actif de Jean dell’Agnello, qui s’empara de la souveraineté de Pise, par le conseil de Barnabos, et se fit d’abord nommer doge et ensuite seigneur. En 1371, au contraire, nous le retrouvons dans la ligue formée par le pape Grégoire XI contre les Visconti, et il bat deux fois les troupes de ces seigneurs de Milan (5 janvier et 8 mai 1372) sur le Panaro et au pont de Chiesi. Trois ans après, toujours par l’ordre du pape, ou pour mieux dire de son légat, Guillaume de Noellet, il ravagea le territoire de Florence ; et les Florentins, pour se racheter d’une destruction complète, furent obligés de lui compter 130,000 florins d’or. Les troubles de Naples lui donnèrent ensuite l’occasion d’exercer ses talents. Charles III se l’attacha en 1382, et il paraît que c’est surtout par le conseil d’Acuto que ce prince prit le sage parti de laisser se fondre d’elle-même, par le besoin et sans jamais risquer d’action générale, l’armée de son compétiteur Louis d’Anjou. En 1387, Acuto se mit à la solde de François Ier de Carrare, seigneur de Padoue, alors allié de Barnabos, contre Antoine della Scala de Vérone et les Vénitiens. La compagnie d’Acuto contribua activement aux succès qu’obtinrent les alliés et qui amenèrent la ruine de la maison della Scala, et, peu après, celle des Carrare eux-mêmes, par une atroce perfidie de