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ques, principal ouvrage d’Apollonius. Ce traité lui mérita, dit Géminius, le titre de grand géomètre parmi ses contemporains. On ne peut pas dire cependant qu’il fut l’inventeur de tout ce que renferme son ouvrage ; car c’est Aristée l’Ancien, qui vivait 350 ans avant notre ère, que l’on cite pour s’être appliqué le premier aux sections coniques : mais en recueillant ce qui avait été fait avant lui, Apollonius y ajouta considérablement. Il paraît que les premiers qui ont considéré les sections coniques supposaient le plan coupant perpendiculaire au côté du cône, et employaient par conséquent trois cônes distincts pour obtenir l’ellipse, la parabole et l’hyperbole, qu’ils désignaient sous les noms de section du cône acutangle, section du cône rectangle, section du cône obtusangle. Apollonius les a tirées toutes d’un cône oblique à base circulaire, mais quelconque d’ailleurs, et leur a assigné les noms qu’elles portent aujourd’hui ; au moins pour l’ellipse et l’hyperbole, puisque le mot parabole se trouve dans les écrits d’Archimède. Apollonius eut des commentateurs illustres, tels que Pappus, la savante et malheureuse Hypatia, Serenus, Eutocius. L’étendue et l’élégance de son ouvrage des Sections coniques firent probablement disparaître les ouvrages qui l’avaient précédé, comme les Éléments d’Euclide survécurent à tous les autres traités du même genre. La difficulté de se procurer les exemplaires d’un ouvrage, avant qu’on eût inventé l’imprimerie, ne permettait guère que de s’attacher aux plus importants, et forçait souvent à se contenter d’extraits ou de fragments plus ou moins étendus ; et, par malheur, ce sont de ces copies tronquées qui ont échappé seules à la main destructive du temps. Des huit livres qu’Apollonius avait écrits sur les sections coniques, il ne nous en est parvenu, en original, que quatre, dont Memmius a donné le premier une version latine, imprimée à Venise en 1537. Commandin, en 1566, en publia une nouvelle plus exacte, et à laquelle il joignit le commentaire d’Eutocius et les Lemmes de Pappus, qui donnaient quelques indications sur ce que devaient contenir les livres perdus. Les Arabes, lorsqu’ils transportèrent chez eux les sciences de la Grèce, ne négligèrent point les écrits d’Apollonius ; ils en firent plusieurs traductions, et même des abrégés. Le géomètre persan Nassir-Eddin, en 1250, en revit un et l’enrichit de notes : mais tout cela était ignoré en Europe, où l’on ne s’appliquait point encore à la littérature orientale ; et Viviani, géomètre italien, disciple de Galilée, travaillait à sa Divination des livres d’Apollonius, que l’on ne possédait pas, lorsque Alphonse Borelli trouva, dans la bibliothèque des Médicis, à Florence, un manuscrit arabe, qu’à l’inspection des figures il reconnut pour une traduction des Sections coniques d’Apollonius. Il obtint la permission d’emporter l’ouvrage à Rome, ou, avec l’aide d’Abraham Ecchellensis, il parvint à traduire en latin les 5e, 6e et 7e livres, que cette traduction contenait de plus que les exemplaires grecs publiés jusqu’alors ; mais Viviani, qui voulait s’assurer la propriété de ses découvertes sur cette matière, obtint que Borelli ne publiât rien avant qu’il eût lui-même fait paraître son travail. Depuis cette époque, il parvint en Europe d’autres traductions arabes, parmi lesquelles on remarque l’exemplaire apporté par le savant Golius ; elles ne contenaient encore que sept livres ; mais elles présentèrent des variantes précieuses, soit pour remplir des lacunes dans les livres précédents, soit pour corriger des passages défectueux. C’est avec leur secours qu’Halley a donné l’excellente édition du traité des Sections coniques d’Apollonius, déjà citée, et que Grégori avait commencée ; le 8e livre s’y trouve, mais seulement restitué par Halley, d’après les indications tirées des Lemmes de Pappus. Apollonius est encore l’auteur d’autres ouvrages, dont plusieurs ne sont connus que par leurs titres, ou par quelques fragments et des sommaires, insérés dans les collections mathématiques de Pappus. Ces ouvrages sont : de Sectione rationis, de Sectionz spatii, de Sections determinata, de Tactionibus, de Inclinationibus, enfin de Locis planis. Le premier nous est parvenu en arabe ; Halley en a publié la traduction latine, en 1708, avec une restitution du second, fondée sur les indications transmises par Pappus ; Robert Simson, géomètre du siècle dernier, qui s’est exclusivement occupé de la géométrie ancienne, a laissé, dans ses ouvrages posthumes, une restitution du traité de Sectione déterminata. Les titres de la plupart des ouvrages indiqués ci-dessus ne peuvent guère en faire saisir l’objet aux lecteurs qui ne sont point initiés dans l’analyse géométrique des anciens, qui consistait dans un système de propositions lemmatiques, auxquelles ils ramenaient la démonstration des théorèmes et la solution des problèmes, et dont il importait par conséquent beaucoup d’augmenter le nombre et de varier les sujets, par la combinaison des rapports que pouvaient présenter les lignes et les espaces. C’est à ce genre d’ouvrages que se rapporte le traité de Inclinationibus, dont M. Horsley a donné une restitution, imprimée à Londres en 1770. On a des idées plus nettes sur celui de Tactionibus, qui a pour objet le contact des lignes droites et des cercles. Viéte a tâché de le rétablir, et d’autres modernes ont résolu les questions qu’il pouvait contenir, et les ont généralisées en les étendant aux sphères. Ceux qui voudraient connaître en détail cette partie assez curieuse de l’histoire des mathématiques doivent consulter l’ouvrage que J.-G. Camerer a publié sous le titre d’Apollonii Pergæi de Tactionibus quæ supersunt, ac maxime Lemmata Pappi in hos libros, cum observationibus, etc., Gotha, 1795, in-8o. Le traité de Locis planis, ou des lieux plans, qui n’est qu’un recueil de propriétés du cercle et de la ligne droite, et qui répond à peu prés à la construction des équations du premier et du second degré, a été restitué par Robert Simson. Je n’admets ici, au nombre des restitutions de ce dernier ouvrage, comme des autres, que celles qui sont composées dans les termes de la géométrie ancienne. Le fragment du second livre des collections mathématiques de Pappus, publié par Wallis, nous apprend qu’Apollonius s’est occupé de recherches arithmétiques, et qu’il a composé un traité sur la multiplication des