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appartenait à une époque fort ancienne de la sculpture grecque, entre la 72e et la 94e olympiade ; mais cette opinion a été réfutée complétement par Winkelmann, et le style même du monument permet de conjecturer que le sculpteur vivait sous les premiers Césars. L-S-e.


ARCHENHOLZ (Jean-Guillaume), historien et journaliste allemand, naquit le 3 septembre 1741, à Langenfurth, l’un des faubourgs de Dantzick, et reçut, pour deuxième nom de baptême, celui de Daniel, auquel il substitua plus tard celui de Guillaume. Destiné à la carrière des armes, il fréquenta l’académie militaire de Berlin, et entra, vers 1760, comme enseigne dans l’armée prussienne. Ses talents et sa bravoure le firent parvenir en peu de temps au grade de capitaine ; mais, à la fin de la guerre de sept ans (1763), il fut congédié, ou plutôt cassé, parce que Frédéric II, qui était très-sévère sur les mœurs des officiers de son armée, avait appris qu’il s’adonnait au jeu. Rendu à la vie privée, Arcnenholz quitta la Prusse, et passa seize ans à visiter les contrées les plus remarquables du nord et du midi de l’Europe. On assure que, privé de fortune, le jeu et un commerce très-décrié furent alors ses uniques moyens de subsistance. Pendant son séjour à Florence il se cassa une jambe en tombant de cheval, et cet accident le rendit, pour le reste de sa vie, perclus du pied droit. Revenu en Allemagne, il demeura successivement à Dresde. À Leipsick et à Berlin, coopérant à la rédaction de divers journaux. Archenholz n’avait pas reçu une éducation littéraire proprement dite, mais il était doué d’un esprit observateur et de cette sagacité rare qui fait démêler au premier coup d’œil les rapports les plus intimes des événements et de leurs causes ; il avait acquis une profonde connaissance des hommes et du monde, et le talent de s’exprimer avec facilité et élégance ; qualités qui le rendaient éminemment propre à la profession de journaliste, et qui expliquent la vogue qu’eurent les différentes feuilles auxquelles il travailla. Le premier ouvrage périodique qu’il publia sous son nom fut le journal mensuel intitulé Littérature et statistique des nations (Leipsick, 1785-1701), aussi distingué par le choix, la nouveauté et la variété des matières, que par la supériorité des vues avec laquelle elles étaient traitées. Encouragé par les éloges que lui valut cette publication, il fit paraître son ouvrage intitulé : l’Angleterre et l’Italie (Leipsick, 5 vol. in-8o), où il consigna les souvenirs de son séjour dans ces deux pays. Ce livre, qui a été réimprimé très-souvent en Allemagne, et traduit dans presque toutes les langues de l’Europe[1], obtint des son apparition un succès immense, et fonda la réputation de l’auteur. On y admirait son talent pour les descriptions a effet, et l’art avec lequel il répandait de l’agrément sur les moindres détails, et donnait la grâce de la nouveauté aux choses les plus connues. Du reste, cette production fourmille d’erreurs ; elle est entachée d’un bout à l’autre d’une partialité puérile pour l’Angleterre, et fournit ainsi une nouvelle preuve, qu’en littérature comme en beaucoup d’autres choses, c’est plutôt l’agrément des formes que la solidité du fond qui captive les suffrages du public. Dans l’Almanach historique de Berlin pour 1789, Archenholz fit insérer une Histoire de la guerre de sept ans, qui a le mérite, fort rare en Allemagne, d’être écrite avec précision et clarté, mais où l’on ne trouve pas toujours l’impartialité désirable dans un historien. Cet ouvrage, dont il donna en 1793 une seconde édition considérablement augmentée (Leipsick, 2 vol. in-8o), a été traduit en français par le baron de Boeck (Strasbourg, 1789, 2 vol. in-8o) ; et par d’Arnex (Berne, 1789, in-8o). En 1791, Archenholz fit un voyage a Paris, et l’année suivante il s’établit à Hambourg, où il commença à publier une Minerve, recueil mensuel politique et littéraire, dont la réputation devint bientôt européenne. Les principes libéraux et l’admiration exclusive pour l’Angleterre qu’il professait dans ce journal étaient peu faits pour lui concilier la faveur des hommes influents de l’Allemagne. On ne manqua pas de lui susciter des embarras de toute espèce pour le dégoûter de son entreprise, mais il tint ferme et la continua, a de courtes interruptions près (en 1806 et 1810), jusqu’à la fin de l’année 1811. À cette époque, il céda la Minerve à M. Bran, libraire d’Iéna, qui en poursuivit la publication de 1812 à 1823. Si Archenholz, comme écrivain politique, ne se montre pas toujours rigoureusement conséquent dans ses opinions, et se laisse quelquefois dominer par les circonstances, il rachète ces défauts par une franchise pleine de courage et de dignité. Ce fut lui qui, le premier en Allemagne, osa blâmer hautement la détention du général Lafayette à Olmutz. L’article qu’il inséra a ce sujet dans la Minerve (février 1793) lui valut de la part du prisonnier une lettre de remercîments qui a été rapportée dans l’Histoire de France depuis la révolution de 1789, par Toulongeon. Malgré le travail assidu auquel l’obligea la Minerve, dont presque tous les articles sont sortis de sa plume, Archenholz trouva encore le temps de composer plusieurs ouvrages d’une grande étendue. Ainsi, de 1789 à 1798, il publia ses Annales britanniques (Hambourg, Brunswick et Tubingue, 20 vol. in-8o), qui comprennent les dix années 1788-1797, et présentent un résumé exact des débats du parlement, et de tout ce qui s’est passé de remarquable dans les trois royaumes pendant cet espace de temps. Il fournit au Calendrier historique des dames (Leipsick, 1798) une Histoire de la reine Élisabeth (imprimée séparément en 1 vol. in-8o, Berlin, 1798), où les événements sont développés et racontés d’une manière si dramatique et dans un style si plein de poésie, qu’on aurait de la peine à trouver un roman d’une lecture plus attrayante. En 1801 parut son Histoire de Gustave Wasa, suivie d’un aperçu de l’état de la Suède depuis les temps les plus anciens jusqu’à la fin du 15e siècle, Tubingue, 2 vol. in-8o (traduite en français par le chevalier de Propiac, 1803, 2 vol. in-8o),

  1. On en a deux traductions françaises : l’une par Bilderbeck, Paris et Strasbourg, 1787, 3 vol. in-12 ; l’autre par un anonyme, Bruxelles, 1788, 2 vol. in-12.