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de son choix. Revenu à Yorck, il rétablit la foi chrétienne sur les ruines du paganisme, et épousa une femme appelée Guanhnmara, élevée dans la famille de Cador, duc de Cornouailles, la même qui, sous le nom de Genièvre, a été le sujet de plusieurs romans en vers, et qui est plus renommée par sa beauté que par sa fidélité conjugale. On le représente ensuite comme envahissant l’Irlande, l’assujettissant entièrement, et obtenant le même succès dans l’Islande, la Gothlande et les îles Orcades ; mais ce ne sont pas la les plus croyables de ses aventures. Pour se reposer de ces travaux, il gouverne son royaume en paix pendant douze ans, et éleva, dit-on, sa cour à un degré de splendeur et de civilisation qui s’accorde mal avec la barbarie du siècle. Il institua son fameux ordre des chevaliers de la table ronde, ces modèles de la chevalerie, devenus si fameux chez les romanciers. Le reste de son histoire est mêlé des plus extravagantes fictions. L’orgueil et l’ignorance de quelques anciens écrivains, ses compatriotes, lui font conquérir la Norwége, le Danemark et la France, tuer un géant espagnol et déclarer la guerre à l’empire romain. Selon eux, il était en pleine marche sur Rome, lorsqu’il reçut la nouvelle que son neveu Modred s’était, en son absence, révolte contre lui, et avait épousé sa femme. Arthur, obligé de revenir défendre ses propres États, livra trois batailles à Modred, qui avait appelé a son secours les Saxons et les barbares du Nord. Dans la dernière, il fut victorieux ; mais il reçut tant de blessures, qu’il se retira dans l’île d’Avalon, où il mourut, l’an 542. Whitaker est l’écrivain qui a mis le plus de soins à éclaircir cette histoire. Il admet qu’Arthur fut souverain (arth-uir) des Silures, et qu’il combattit sous les ordres d’Ambrosius, pendragon des Bretons (voy. Ambrosius), qui l’envoya secourir les Bretons du Nord, opprimés par les Saxons, et qu’ensuite il devint lui-même chef suprême de ses compatriotes. Arthur fut enterré à Glassenbury, et sous le règne de Henri II, vers l’an 1189, son cercueil fut découvert, et on trouva près de son corps une petite croix de plomb, sur laquelle étaient gravés ces mots : Hic jacet seputuss inclytus rex Arturius in insula Avalonia. Après avoir rapporté cette preuve irrécusable de l’existence d’Arthur, on ne peut mieux terminer cet article que par l’observation judicieuse d’un écrivain anglais : « Si ce héros eût été moins célébré par les faiseurs de romans, on n’aurait peut-être pas révoqué en doute la vérité des exploits que de plus graves historiens lui ont attribués. » Le récit des exploits fabuleux d’Arthur peut se lire dans l’Histoire de la poésie anglaise de Warton, dans le Recueil de vieilles romances anglaises d’Ellis, et dans l’Histoire des fictions de Dunlop. L’histoire de sa vie a été écrite par Sharon Turner, Histoire des Anglo-Saxom. D-t.


ARTHUR DUCK. Voyez Duck.


ARTHUS, ou ARTUR, Ier duc de Bretagne, fils posthume de Geoffroi, troisième fils du roi d’Angleterre Henri II, et de Constance de Bretagne, héritière de ce duché, naquit à Nantes, le 30 avril 1187. Il n’avait pas encore neuf ans, que son oncle Richard Ier, roi d’Angleterre, en partant pour la terre sainte avec Philippe-Auguste, s’engagea, par un traité avec Tancrède, roi de Sicile, à faire épouser la fille de ce prince au jeune Arthus, son héritier présomptif. Les droits d’Arthus à la couronne d’Angleterre furent alors établis d’une manière non moins authentique par l’évêque d’Éli, régent du royaume ; il reconnut le jeune prince pour héritier de Richard, et le fit reconnaître, en la même qualité, par le roi d’Écosse. La duchesse Constance fit aussi proclamer son fils duc de Bretagne, dans une assemblée générale à Rennes, en 1196. Richard ne conserva pas longtemps ces bonnes dispositions pour son neveu. Il résolut de le dépouiller de ses États ; mais connaissant toutes les difficultés de cette entreprise tant que la duchesse Constance veillerait aux intérêts de son fils, il la pria de venir le trouver en Normandie, et la fit enlever en route, par son mari, le comte de Chestre. Fier du succès de sa ruse, le roi d’Angleterre entra en Bretagne, et y commit mille atrocités. Il ne put cependant se rendre maître de la personne d’Arthus, qui fut sauvé par l’évêque de Vannes, et conduit à la cour de France. Cette évasion, et la crainte de voir les Bretons embrasser le parti de Philippe-Auguste, rendirent peut-être Richard moins difficile sur les conditions de la paix. Elle fut conclue en 1197 : Constance fut mise en liberté, et continua de gouverner la Bretagne pendant la minorité de son fils ; Richard feignit même d’avoir rendu son amitié au jeune Arthus ; mais en mourant (le 6 avril 1199), il déclara, par son testament, Jean-sans-Terre son successeur, au préjudice d’Arthus. On prétendit que ce testament était supposé. L’Anjou, le Maine et la Touraine se déclarèrent en faveur d’Arthus ; le roi de France reçut son hommage pour ces trois provinces, ainsi que pour la Bretagne, le Poitou et la Normandie. Le jeune prince annonçait les qualités les plus brillantes et les plus aimables ; tous les cœurs étaient pour lui ; mais il était sans argent, sans armée, tandis que son compétiteur, qui s’était emparé des trésors de Richard, n’avait pas perdu de temps pour lever des troupes. On proposa de laisser l’Angleterre à Jean, et de donner les provinces du continent à Arthus. La duchesse Constance mourut en 1201, au milieu de ces négociations, qui n’eurent aucun résultat. Arthus ne pouvait pas faire une plus grande perte dans de telles circonstances. Cependant Philippe-Auguste, qu’on avait vu abandonner ou protéger le duc de Bretagne, selon qu’il y trouvait son avantage, l’arma chevalier à Gournay, reçut de nouveau son hommage, et déclara la guerre à Jean. Arthus, plein de feu et de courage, court assiéger la ville de Mirebeau en Poitou ; mais le roi Jean, qui était en Normandie, arrive à la tête de forces considérables, le surprend et le fait prisonnier avec les principaux seigneurs de son parti. Il en fit enfermer vingt-deux des plus distingués par leur valeur dans le château de Cerf, où ils périrent de faim, et il envoya Arthus dans la prison de Falaise. Jean conçut alors le