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dedans, les cris des païens, dont le zèle d’Athanase rendait les temples déserts, animèrent contre lui Julien l’Apostat. Le saint patriarche se vit obligé de regagner la Théhaïde pour mettre sa vie en sûreté. La mort de cet empereur, et l’avènement de Jovien au trône impérial, le ramenèrent ses fonctions. Le règne de Jovien ne fut que de huit mois. Valens, son successeur, entièrement livré aux ariens, força de nouveau le patriarche à la retraite. Il lui fallut se dérober, par ruse, aux empressements de son peuple, qui voulait le retenir de force, et aller chercher un asile parmi les morts, dans le sépulcre de son père. Valens, craignant les effets du ressentiment des Alexandrins, qui murmuraient hautement de l’éloignement de leur pasteur, lui permit, au bout de quatre mois de prescription, de rentrer dans son église, et ce fut pour y passer enfin paisiblement le reste de ses jours dans l’exercice de ses fonctions, jusqu’à sa mort arrivée en 373, après quarante-six ans d’épiscopat, dont il en avait passé vingt dans différents exils, et la plus grande partie des autres dans des combats continuels pour la défense de la foi de Nicée. « Athanase, dit la Bletterie, était le plus grand homme de son siècle, et peut-être qu’a tout prendre, l’Église n’en a jamais eu de plus grand. Il avait l’esprit juste, vif et pénétrant, le cœur généreux et désintéressé, un courage de sang-froid, et, pour ainsi dire, un héroïsme uni, toujours égal, sans impétuosité ni saillies, une foi vive, une charité sans bornes, une humilité profonde, un christianisme mâle, simple et noble comme l’Évangile, une éloquence naturelle, semée de traits perçants, forte de choses, allant droit au but et d’une précision rare dans les Grecs de ce temps-là. L’austérité de sa vie rendait sa vertu respectable : sa douceur dans le commerce le faisait aimer. Le calme et la sérénité de son âme se peignaient sur son visage : jamais ni les Grecs ni les Romains n’aimèrent ans tant la patrie qu’Athanase aima l’Église, dont les intérêts furent toujours inséparables des siens. Une longue expérience l’avait rompu aux affaires : l’adversité lui avait donné un coup d’œil admirable pour apercevoir des ressources, même humaines, quand tout paraissait désespéré. Personne ne discerna mieux que lui les moments de se produire ou de se cacher, ceux de la parole ou du silence, de l’action ou du repos. Il sut fixer l’inconstance du peuple, trouver une nouvelle patrie dans les lieux de son exil, entretenir des correspondances, ménager des protections, lier entre eux les orthodoxes, encourager les plus timides, d’un faible ami ne se faire jamais un ennemi, excuser les faiblesses avec une charité et une bonté d’âme qui font sentir que, s’il condamnait les voies de rigueur en matière de religion, c’était moins par intérêt que par principe et par caractère. Julien, qui ne persécutait pas les autres évêques, du moins ouvertement, regardait comme un coup d’État de lui ôter la vie, croyant que la destinée du christianisme était attachée à celle d’Athanase. » Ses écrits sont, les uns de controverse, les autres historiques, les autres moraux. Photius, si bon juge en cette partie, en fait un très-grand éloge. Ils ne sont cependant pas tous d’une égale force, ni composés avec la même élégance. Le loisir lui manquait souvent pour les polir, d’autant qu’il les écrivait quelquefois en fuyant dans les déserts de la Thébaïde ; mais le style en est toujours clair, et le ton proportionné aux sujets et aux personnes. Son Apologie à l’empereur Constance est un chef-d’œuvre en ce genre. Ses ouvrages de controverse ont principalement pour objet les mystères de la Trinité, de l’incarnation et de la divinité du St-Esprit ; et sont dirigés contre les ariens, les sélaciens, les apollinaristes et les macédoniens. Les historiques contiennent une foule de détails sur l’histoire ecclésiastique de son temps qu’on chercherait vainement ailleurs, du moins présentés avec la même exactitude. Quant au Symbole qui porte son nom, presque tous les critiques s’accordent à dire qu’il n’est pas de lui. La plus ancienne édition des œuvres de St. Athanase est de Vicence, 1482, en latin seulement. Commelin est le premier qui en ait donné une en grec avec la traduction latine de Nannius, Heidelberg, 1601, 2 vol. in-fol. Cette édition était extrêmement défectueuse, soit pour le texte, soit pour la version. Celle que D. Montfaucon publia en 1698, Paris, 3 vol. in-fol., reliés en deux, est une des plus parfaites éditions des saints Pères qu’aient données les bénédictins. Le même éditeur fit imprimer, en 1706, une collection en 2 vol. in-fol., sous le titre de Collectio nova Patrum, dont le second est regardé comme un supplément à l’édition de St, Athanase, parce qu’il est, pour la plus grande partie, composé des écrits du saint docteur, ou du moins qui portent son nom. L’édition des bénédictins a été réimprimée à Padoue, en 1777, en 4 vol. in-fol., et quoiqu’on y ait inséré les pièces de la collection dont nous venons de parler, on lui préfere celle de Paris, à cause de la beauté de l’exécution typographique. Godefroi Hermant, docteur en théologie et chanoine de Bauvais, a donné une vie très-détaillée de St. Athanase, en 2 vol. in-4. T—D.


ATHANASE II, évêque et duc de Naples, avait été consacré, en 877, par le crédit de son frère Sergius II, alors duc de Naples ; mais l’année suivante il conspira contre ce frère, que son alliance avec les Sarrasins avait rendu odieux au pape ; il lui fit arracher les yeux et le fit conduire à Rome, où Sergius mourut en prison. Le pape Jean VIII parait avoir pris part a cette conjuration, et il écrivit au nouveau duc Athanase pour le féliciter ; mais, contre son attente, Athanase renouvela l’alliance de son frère avec les Sarrasins, favorisa leur établissement dans le voisinage de Naples, et, s’associant a leurs brigandages, partagea le butin qu’ils enlevaient dans les États de l’Église et dans ceux des princes lombards. Athanase fut excommunié par le pape, comme l’avait été son frère, et n’en tint aucun compte ; il répandit la désolation dans tout le midi de l’Italie, jusqu’à l’an 900 qu’il mourut. Ses voisins l’avaient en horreur, mais les Napolitains surent gré à ce prélat guerrier d’avoir rétabli la réputation de leurs armes S-S-I.